Titus Odong Kusumajati, Indonésie

Publié le 20.03.2007| Mis à jour le 08.12.2021

Dans un contexte économique et politique plus favorable, les petits paysans restent très vulnérables.

Aider les petits paysans face à la mondialisation


Paris, mars 2007

La situation économique s’est légèrement dégradée au cours de ces deux dernières années, à cause des hausses du prix du pétrole à laquelle s’ajoute, depuis maintenant huit mois, celle du prix du riz, qui représente la base de notre alimentation. La première raison à cette hausse est une mauvaise récolte et la seconde, l’importation de riz. Ces importations auraient dû faire baisser les prix, mais c’est l’inverse qui s’est produit. Résultat, même en milieu rural, les gens rencontrent de plus en plus de difficultés pour se payer de la nourriture.

Maintenant, si l’on regarde nos performances au niveau macroéconomique, on peut considérer que tout ne va pas si mal. Après la crise économique de 1997, notre économie s’était retrouvée en chute libre, maintenant les indicateurs reprennent de la couleur. Pour autant ces indicateurs macroéconomiques ne reflètent en rien ce qui se passe au niveau de ce que j’appelle l’économie « réelle ». Si, dans l’absolu, les revenus ont bien augmenté depuis la crise, les prix, eux, se sont envolés de telle façon que le revenu « réel » est en fait en train de baisser.

L’empreinte du FMI et de la Banque mondiale

Je pense que l’intervention du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, en 1998, pour nous aider à sortir de la crise, n’y est pas pour rien. La fin des subventions gouvernementales sur certains produits, notamment, pour les paysans, celles sur les fertilisateurs, les pesticides et le gasoil, a véritablement réduit leurs capacités de production.

Avec la « Révolution verte » des années 1960, le gouvernement avait pris l’habitude de distribuer massivement ces produits pour améliorer la production et soudainement, il n’y a plus d’aides directes pour leur achat. Tout ça, non pas pour améliorer la qualité de notre environnement, beaucoup d’entre nous sont d’ailleurs convaincus que ces produits sont nocifs, mais parce que c’est ce que lui ont dicté le FMI et la Banque mondiale.

Recherche d’alternative
De nombreuses Ong, dont la mienne, travaille sur cette problématique de la recherche de produits alternatifs pour remplacer les intrants chimiques. L’introduction de nouvelles techniques, agriculture biologique, compost naturel, a rendu nos paysans moins dépendants des produits chimiques. Même si les plus jeunes se plaignent un peu des difficultés rencontrées, notamment au niveau de l’acheminement de ces engrais naturels, plus volumineux et plus lourds, et que les anciens ne voient là-dedans rien de nouveau, tous s’y sont mis pour des raisons économiques évidentes.

Maintenant, ce que nous essayons de faire, c’est de renforcer ces activités, que j’appellerai « para-agricoles », production de compost ou de biopesticides, artisanat et autres, et de les intégrer dans l’économie du village. Qu’il n’y ait plus de séparation entre le travail des champs et le reste. Recréer une économie villageoise. Nous avons ainsi trois villages qui travaillent désormais ensemble, dans tous les domaines. Ils se sont dotés d’une institution financière elle aussi alternative, qui leur permet d’emprunter à crédit. Ce qui serait impossible dans le cadre du système bancaire traditionnel, car ces gens sont beaucoup trop pauvres.

L’impact de la mondialisation jusque dans les villages les plus reculés
En ce moment, l’un des thèmes majeurs de nos formations est celui de l’impact de la mondialisation dans leurs vies quotidiennes. Notamment, même si tout n’est pas mauvais dans cette globalisation, sur ses aspects négatifs. Par exemple, lorsque nous parlons des différentes semences. Quand nous parlons désormais de graines hybrides, il ne s’agit pas des différentes variétés locales, mais plutôt de celles qui sont produites par des groupes internationaux.

Il en va de même pour les pesticides ou les fertilisateurs, tous sont produits par des sociétés privées ou semi privées, qui sont elles-mêmes la propriété de groupes plus important et tout cela pour finir entre les mains d’une poignée de grosses compagnies multinationales. Quand les subventions sont supprimées, et que ces graines, ces pesticides, etc. se retrouvent sur un marché « libre », qui n’en a d’ailleurs que le nom, nos paysans sont bel et bien en contact direct avec la mondialisation.

Amélioration politique
Sur le plan politique, je pense que cela va un peu mieux depuis l’arrivée au pouvoir de Susilo Bambang Yudhoyono (Ndlr : en septembre 2004), même si les querelles entre les partis n’ont pas cessé, mais, cela ne se passe-t-il pas partout ? Cela fait du bien de voir que nous, les Indonésiens, commençons à obéir à nos lois, à notre constitution. La démocratisation du pays avance petit à petit. Désormais, quand nous élisons notre président, nos députés, nos représentants, à quelque niveau que ce soit, je crois que l’on peut dire que le processus démocratique est respecté et qu’il y a de moins en moins de corruption. Maintenant, il y a un autre problème, qui est celui de la qualité de ceux qui sont censés nous représenter, dont les qualifications pour ces postes, notamment au niveau local, sont parfois très douteuses. Mais, peut-être est-ce là le prix à payer pour parvenir enfin à une vraie démocratie. Nus sommes toujours en train d’apprendre.

Propos recueillis par Patrick Chesnet

Titus Odong Kusumajati est directeur adjoint de Cindelaras Paritrana Foundation

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