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Anniversaire des Panama papers et guerre en Ukraine
Six ans jour pour jour après la révélation du scandale des Panama Papers, les sanctions contre les oligarques russes ont mis de nouveau en lumière les pratiques qui permettent aux super-riches et aux criminels de s’affranchir des lois des pays où ils résident et de vivre dans le luxe sans payer d’impôts
Le 3 avril 2016, des journalistes et lanceurs d’alerte ont révélé aux citoyen-ne-s du monde entier les « Panama Papers », sur les circuits financiers opaques utilisés par des chefs d’Etat, milliardaires, criminels pour cacher des avoirs dans les paradis fiscaux avec la complaisance d’une kyrielle d’intermédiaires (banquiers, avocats, cabinets d’audit, notaires, agents immobiliers,…).
Six ans jour pour jour après cette révélation, à l’heure où la guerre sévit en Ukraine suite à l’agression de la Russie, les sanctions contre les oligarques russes ont mis de nouveau en lumière les pratiques de ces kleptocrates qui investissent à l’étranger, souvent via des sociétés offshore et des hommes de paille, rendant leur identification difficile, voire impossible. Toujours les mêmes schémas, qui bien au-delà des oligarques russes, permettent aux super-riches et aux criminels de s’affranchir des lois des pays où ils résident et de vivre dans le luxe sans payer d’impôts. Les détenteurs de cette richesse offshore peuvent ainsi se soustraire à l’impôt, procéder à des investissements ou des achats de manière anonyme, ou encore blanchir de l’argent issu de la corruption ou d’autres activités criminelles.
Malgré certaines avancées, l’opacité est encore la règle et permet à ces schémas frauduleux de prospérer. Les conséquences sont réelles, concrètes, sur la vie des citoyen-ne-s : lorsque les plus riches ne paient pas leur juste part d’impôt, ce sont des moyens en moins pour investir dans les services essentiels, sans évoquer l’érosion de la confiance dans nos démocraties qui en résulte. Ce système financier empêche la garantie et la réalisation concrète de droits humains, économiques, sociaux et environnementaux par les Etats, fragilise les démocraties et renforce les régimes autocratiques. La pratique fiscale de quelques-uns nuit à la protection de tou-te-s.
10% du PIB mondial est localisé dans les paradis fiscaux
Gabriel ZucmanLes Etats, en particulier ceux des pays en développement, perdent des centaines de milliards d’euros chaque année qui devraient être consacrés au financement des services publics, à la lutte contre la pauvreté et à la transition climatique.
Il est plus que temps de s’attaquer réellement au modèle des paradis fiscaux, de réguler les mouvements financiers, d’encadrer les acteurs économiques, d’adopter des mesures de transparence et de doter les services de police économique et financière et les juges de capacités de détection et de moyens financiers à la hauteur du défi que représente la lutte contre ces flux financiers illicites.
Cela permettra une meilleure taxation des plus riches et des grandes entreprises, encore largement capables de pratiquer l’évasion fiscale en dépit des récentes négociations internationales sur l’imposition des multinationales.
Les réglementations qui existent déjà, notamment au sein de l’Union Européenne, sont insuffisantes pour s’attaquer au cœur du problème car incomplètes et mal appliquées. En particulier, l’opacité qui entoure l’identité de ceux qui détiennent sociétés et autres trusts (les “propriétaires réels”) est encore un problème majeur, sur lequel les Etats membres de l’Union Européenne peuvent agir dès les prochains mois, dans le cadre de l’adoption d’un nouveau paquet législatif de lutte anti-blanchiment.
La création d’un registre centralisé et public de tous les actifs, recommandé de longue date par les économistes de l’ICRICT, (Commission indépendante pour la réforme de la fiscalité internationale des entreprises), et le renforcement des sanctions pour non-déclaration ou fausse déclaration des bénéficiaires effectifs de tous types d’actifs détenus sur le territoire national pourraient permettre d’aller encore plus loin pour lutter contre les flux financiers illicites, mais aussi pour éclairer les débats publics sur la répartition des richesses.
La France devra prendre ses responsabilités : longtemps pionnière de la transparence fiscale, elle s’est illustrée par des positions conservatrices, alignées sur les intérêts des lobbys privés, dans les négociations européennes dans la lutte contre l’évasion fiscale.
Tribune publiée sur le Blog de Mediapart –
Signataires :
Nadège Buquet, directrice de Transparency International France
Sandra Cossart, directrice de Sherpa
Chantal Cutajar, présidente de l’OCTFI
Manuèle Derolez, déléguée générale du CCFD-Terre Solidaire
Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France
Anne Guyot-Welke, secrétaire générale de Solidaires Finances Publiques
Raphaël Pradeau, porte parole d’Attac France
Najat Vallaud-Belkacem, directrice France de ONE
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Évasion fiscale : 7 mythes autour de la taxation des multinationales
A l’occasion du G20 du 31 au 31 octobre 2021 qui doit entériner l’accord sur la taxation des multinationales négocié à l’OCDE, le CCFD-Terre Solidaire publie une analyse pour démystifier cet accord. Présentée comme historique par certains chefs d’Etats, cette réforme présente pourtant des lacunes majeures.
Cet accord est loin de mettre un terme à l’évasion fiscale des multinationales, qui prive les États de centaines de milliards d’euros chaque année, en particulier les pays en développement. Les multinationales pourront continuer leurs tours de passe-passe entre leurs filiales pour échapper à l’impôt. Il est en plus particulièrement injuste pour les pays en développement, qui vont recevoir très peu de bénéfices, alors que les pays les plus riches sont avantagés. Parce qu’il est indispensable de comprendre ce que propose vraiment cet accord complexe, nous revenons sur 7 mythes.
Mythe 1 : La réforme va permettre de mettre un terme aux pratiques d’évasion fiscale des multinationales
Réalité : Le système fiscal défaillant reste en place et les multinationales pourront continuer leurs pratiques d’évasion fiscale.
Mythe 2 : Les multinationales vont enfin payer des impôts là où elles ont une vraie activité
Réalité : La réforme instaure un système où c’est le pays qui abrite le siège de la multinationale qui récupère les bénéfices, plutôt que celui où il y a une réelle activité. Les pays du sud seront donc désavantagés
Mythe 3 : Avec le taux minimum d’imposition à 15%, les multinationales vont enfin payer « leur juste part d’impôt ». Il n’y aura plus de décalage avec les PME
Réalité : Les multinationales auront la possibilité de payer seulement 15% d’impôts en continuant leurs pratiques d’évasion fiscale, alors que les PME paieront plus près des taux nominaux. Les exemptions incluses dans les règles vont baisser le taux d’imposition effectif en dessous de 15%.
Mythe 4 : Le taux minimum d’imposition à 15% va mettre un terme à la course au moins disant fiscal
Réalité : Les États risquent d’accélérer une course à la baisse des taux jusqu’à atteindre le minimum de 15%.
Mythe 5 : Désormais les GAFA et autres géants du numérique vont enfin payer leur juste part d’impôt
Réalité : Certains géants du numérique vont payer un peu plus d’impôts mais ils pourront continuer leurs pratiques d’évasion fiscale puisque l’essentiel des règles ne changent pas. Les grands pays de sièges de multinationales, et notamment les États-Unis, vont récupérer la majeure partie des recettes. L’accord obligera les États à retirer leurs « taxes GAFA » alors qu’elles pourront leur rapporter davantage.
Mythe 6 : Cet accord est équilibré et juste pour tous les Etats du monde. Les pays en développement vont même récupérer plus de recettes que les pays développés
Réalité : Les pays riches vont récupérer la majeure partie des bénéfices de la réforme. L’accord renforce le déséquilibre du système fiscal, déjà construit à l’avantage des pays riches.
Mythe 7 : Cet accord est un accord mondial, négocié par tous les États « sur un pied d’égalité » au sein du Cadre Inclusif de l’OCDE
Réalité : Un tiers des pays du monde ne participe pas aux négociations : 119 États ont signé la déclaration de l’OCDE du 8 octobre, alors que l’ONU comprend 193 États et 2 observateurs permanents. De plus, les négociations à l’OCDE sont biaisées dans l’intérêt des pays membres de l’OCDE, et notamment du G7 et du G20.
Lutter contre l’évasion fiscale des multinationales est indispensable pour permettre aux États de financer les politiques et services publics nécessaires à la réalisation des droits humains, et on ne peut pas se satisfaire d’un accord défaillant. Pour le CCFD-Terre Solidaire, il est urgent de se mobiliser pour :
– La création d’un organisme fiscal à l’ONU où tous les États seront représentés sur un pied d’égalité, et d’une convention fiscale.
– La mise en place d’un système de taxation unitaire pour imposer les multinationales en fonction de leurs activités réelles, accompagné d’un taux minimum d’au moins 25%.Aller plus loin :
Réactive – déclaration de l’OCDE sur les négociations fiscales “Une réforme inefficace dans l’intérêt des pays riches”
Inégalités : un taux mondial minimum d’imposition sur les sociétés de 15% est-ce suffisant ? -
Paradise papers : les paradis fiscaux, comme l’île Maurice, sont une entrave aux droits humains (témoignage)
Chaque année, l’Ile Maurice, véritable paradis fiscal, doit renoncer à des investissements dans le secteur de la santé et de l’éducation. “C’est une atteinte aux droits des populations” estime Arvin Ramsohok, membre de Center for alternative research and studies (Cares), une ONG mauricienne du réseau People’s Dialogue soutenu par le CCFD-Terre Solidaire.
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Aidons l’argent à quitter les paradis fiscaux !
Paris, le 7 octobre 2011 Il y a bientôt un an maintenant démarrait la campagne Aidons l’Argent à quitter les paradis fiscaux. Un an ! Un temps long pour un objectif ambitieux : influencer le Sommet du G20 sous présidence française. Pour atteindre notre objectif, deux temps forts clôtureront cette campagne : la remise symbolique des 430 000 cartes postales à Paris puis l’Altersommet à Nice. Grâce à l’appui du Réseau du CCFD-Terre Solidaire, plus de 430 000 cartes postales-pétitions Monsieur Argent ont été échangées à ce jour et des milliers de gens sensibilisés au sujet du pillage des pays du sud dû à l’évasion fiscale des entreprises multinationales. Ce résultat, nous devons le communiquer aux décideurs avant leur réunion du G20, de manière à ce qu’ils soient conscients que l’opinion française se préoccupe sérieusement du problème des paradis fiscaux et de l’opacité financière. De nombreuses organisations de solidarité – dont le CCFD-Terre Solidaire – et mouvements de la société civile française se sont organisés ensemble pour se mobiliser et faire entendre leur voix face à celle du G20. Le Sommet du G20 de Cannes sous présidence française sera ainsi accompagné d’un Altersommet qui exprimera au travers de manifestations, forum et actions médiatiques son leitmotiv commun : « les peuples d’abord, pas la finance ». Remise des cartes postales de la campagne Aidons l’argent à quitter les paradis fiscaux Le jeudi 27 octobre à 12h30 à Paris, vous êtes tous invités à participer à une action inédite de remise des 450 000 cartes-pétition au G20 pour exiger que l’argent quitte les paradis fiscaux. Cette action de rue, pacifique et accessible à toutes et à tous, consiste à dénoncer l’inaction du G20 face à l’opacité financière et à la fraude fiscale. Le message ? « Ils s’endorment sur leurs responsabilités ! » Alors nous dormirons… Le 27 octobre à Paris, rejoignez-nous pour dénoncer l’inaction du G20 en matière d’évasion fiscale ! Pour préserver la surprise, nous ne communiquerons les détails de cette manifestation que sur cette page et sur la page http://www.facebook.com/aidonslargent au cours des heures qui précéderont le rendez-vous du 27 octobre. Rejoignez-nous ! L’altersommet à Nice Le Sommet du G20 se déroulera à Cannes du jeudi 3 novembre à midi au vendredi 4 novembre en fin d’après midi. L’Altersommet au G20 de Cannes se déroulera à Nice du 1er novembre au 3 novembre 2011 La Coalition G8-G20 (regroupant trente-six organisations citoyennes et mouvements sociaux, dont le CCFD-Terre Solidaire) propose un programme de mobilisation composé d’une manifestation internationale, de débats, de forum et d’actions. Le G20 se penchera en effet sur cinq chantiers plus précis qui ont, parfois à notre insu, un impact direct sur notre vie quotidienne : – Réformer le système monétaire international – Renforcer la régulation financière – Lutter contre la volatilité des prix des matières premières – Soutenir l’emploi et renforcer la dimension sociale de la mondialisation – Lutter contre la corruption – Agir pour le développement (dont taxe sur les transactions financières) Pour toutes informations sur la Coalition G8-G20 2011 et le programme général de mobilisation, rendez-vous sur le site de la coalition www.mobilisationsg8g20.org. Pour toutes informations de fond sur le sujet des paradis fiscaux et du pillage des pays du Sud, le CCFD-Terre Solidaire propose une série d’outil pédagogique dont notamment : – la brochure illustrée d’information et de mobilisation Tax Toy et sa déclinaison en exposition – le nouveau livret de 16 pages Au service du bien commun qui fait le lien entre le sujet des paradis fiscaux et la foi qui anime notre action.Voir le blog des bénévoles du CCFD-Terre Solidaire “En direct de Nice”
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