Publié le 03.05.2011 Mis à jour le 28.03.2013
Les sociétés civiles sont des acteurs incontournables dès lors qu’il s’agit d’encourager les transitions démocratiques.
Depuis la fin de la guerre froide, la nature d’une grande partie des conflits a changé. Les situations de guerres interétatiques classiques n’existent quasiment plus. La conflictualité « latente », ou de faible intensité, qui met aux prises mouvements armés et forces de sécurité devient la forme prédominante de la violence collective. Dans les pays dits en « crise », qui ne sont plus régis par le droit mais par l’arbitraire du despote, les conflits non armés sont monnaie courante : grèves, flambées de violences, manifestations diverses, plus ou moins pacifiques.
La notion d’État fragile sert de clef d’analyse dans tous ces contextes plus ou moins conflictuels. Il n’en existe aucune définition internationalement partagée, mais on les reconnaît généralement à leur incapacité, totale ou partielle, à assurer un État de droit et une gouvernance efficace, à fournir à la population des services sociaux essentiels, à contrôler le territoire et garantir la sécurité des citoyens.
Les conflits modernes ne sont cependant pas l’apanage des États fragiles. Dans les pays démocratiques et économiquement développés peuvent aussi subsister des situations conflictuelles liées à la présence de minorités : les discriminations, les violences dont elles sont victimes sont souvent proportionnelles à leur pauvreté relative, à leur marginalité.
Les sociétés civiles sont des acteurs incontournables dès lors qu’il s’agit d’encourager les transitions démocratiques. Elles participent notamment de :
D’autres axes sont surtout d’ordre opérationnel avec les populations et concernent la reconstruction du capital social : actions humanitaires (secours alimentaire, accueil et suivi de déplacés, accès à l’eau) ; relance des activités génératrices de revenus avec les populations démunies.
Les acteurs impliqués dans des processus de construction de la paix sont variés : militants des Droits de l’Homme, mouvements de femmes, ONG, syndicats, Églises, centres de recherche, autorités traditionnelles, organisations professionnelles (rarement paysannes), médias. De plus en plus de réseaux pluriacteurs (ou « comités nationaux » ou « platesformes ») se mettent en place afin de participer à la sortie de crise.
Mais toutes ces structures ne relèvent pas forcément d’une même tradition ou famille associative, et peuvent recouvrir des intérêts hétérogènes. Certaines choisissent naturellement le terrain du dialogue, d’autres celui de la contestation. La nécessité les réunit mais ces alliances inhabituelles sont complexes. Des brassages, éclatements et recompositions successives peuvent ainsi apparaître.
Néanmoins ces plates-formes représentent aujourd’hui un espoir énorme dans de nombreux pays en crise. La société civile y tient souvent lieu de canal d’expression de l’opinion publique, et, en partie, de représentation nationale, lorsques les voies classiques d’expression démocratique sont entravées.
Le CCFD - Terre Solidaire agit notamment dans les domaines de :
L’Agence considère qu’il existe une relation bijective entre sécurité et paix et développement. Environ 40 % des 70 pays où intervient l’AFD se trouvent en situation de guerre ou de sortie de guerre. L’AFD utilise deux types d’outils lorsqu’il s’agit de soutenir des projets dans des pays en crise. D’une part, les opérations duales visent simultanément à mettre en œuvre un projet économique et social et à traiter, dans le même temps, une cause de fragilité. Par exemple, la relance de la filière cotonnière en Afghanistan doit à la fois permettre un développement économique et offrir aux paysans une alternative à la culture du pavot. D’autre part, l’ancrage des revenus dans des activités économiques pérennes favorise la construction de la paix. L’AFD utilise à cette fin des outils de microfinance, d’appui à l’organisation et de formation professionnelle, en mettant l’accent sur le secteur informel, qui emploie la majeure partie de la population : la Côte d’Ivoire, pays le plus développé d’Afrique de l’Ouest, demeure une économie informelle à 93 %.
Le domaine d’intervention de l’AFD est étroitement ciblé, puisqu’il concerne le développement économique et social. L’Agence cherche, en outre, à prévenir l’apparition de crises violentes ou de guerres ; a minima, il s’agit de ne pas envenimer les situations par manque de connaissance du contexte.
Les limites de l’Agence sont de trois ordres. Tout d’abord, l’AFD se focalise très fortement sur les aspects techniques, financiers et économiques, ce qui entraîne une certaine myopie sociale, alors qu’une analyse à l’aide des sciences humaines serait également nécessaire. Par ailleurs, la taille des projets soutenus par l’AFD est beaucoup trop importante pour que certains détails puissent être pris en compte. L’Agence se montre aussi parfois trop pressée d’engager des projets au détriment des études et analyses préliminaires indispensables, même si certains, parmi ces projets, peuvent en définitive produire du capital social : un programme d’adduction d’eau potable dans les bidonvilles de Port-au-Prince, non seulement très pauvres mais marqués par la violence d’origine mafieuse, a entraîné une réduction des tensions entre groupes antagonistes. Dans le même ordre d’idée, les programmes d’hydraulique pastorale réalisés au Tchad permettent de retarder la descente des troupeaux nomades vers les terres agricoles, diminuant ainsi les tensions entre agriculteurs et éleveurs.
En cela, l’AFD a tout intérêt à travailler avec la société civile car celle-ci est source de capital social en plus du capital économique et humain ; dans certaines circonstances, elle permet un contournement de l’appareil d’État parfois incapable de mettre en place le projet souhaité. Ce qui incite d’autant l’Agence, aujourd’hui, à se rapprocher du CCFD - Terre Solidaire car celui-ci a une capacité d’analyse très fine des contextes, de compréhension des sociétés et de leurs dynamiques. L’Agence sur ce point est demandeuse.
Le CCFD - Terre Solidaire, dont le champ d’action englobe également modes de gouvernance et politique, a de nombreux contacts avec des associations des pays du Sud qui font souvent défaut à l’Agence et in fine, il fait montre d’une capacité à identifier les partenaires les plus intéressants, ce qui permettrait à l’AFD d’être mieux armée pour soutenir les projets les plus novateurs dans le champ de la résolution des conflits et de la construction de la paix.
Sur les thématiques :
Développement Paix et conflit Sociétés civiles Souveraineté alimentaire et agroécologie