Dans une sous-région déstabilisée, des migrants abandonnés

Publié le 10.10.2013| Mis à jour le 02.01.2022

Le « Printemps arabe », mais surtout la chute du régime libyen de Kadhafi ont accru la déstabilisation de toute la sous-région jusqu’au Sahel. Circulation massive d’armes venues du conflit libyen, déplacements de population, les conséquences sont nombreuses notamment pour les migrants subsahariens.


Plus de 300 000 ressortissants du Niger sont rentrés au pays alors même qu’en Libye, ils étaient les seuls soutiens stables de familles vivant dans une contrée au bord de la crise alimentaire[[La situation est d’autant plus dramatique que ces retours coïncident avec le retour massif de Nigériens qui avaient émigré en Côte d’Ivoire et fuient désormais la crise politique.]]. Ces migrants, dont beaucoup ont vécu de graves violences reviennent sans rien. Par ailleurs, la confusion s’installe et ils sont rapidement suspectés de revenir avec des armes, d’être à l’origine d’attaques sur les axes routiers, d’être proches d’Aqmi… Certains migrants de l’Afrique côtière et centrale se positionnent au Nord, à Agadez notamment, en attendant de pouvoir retourner en Libye avec l’espoir que la situation se stabilise.

Au Mali aussi, les migrants subsahariens ayant fui la Libye se comptent par dizaines de milliers. Jusqu’en mars 2012. Date à laquelle les rebelles touareg du MNLA (Mouvement national de libération pour l’Azawad) suivis de près par des groupuscules islamistes proches d’Aqmi, le Mujao ou Ansar Dine, envahissent le nord du pays : le Mali est alors coupé en deux. Les États voisins ferment leurs frontières les uns après les autres : Algérie, Niger, etc. Les migrants en « en déshérence » se trouvent bloqués, abandonnés à eux-mêmes dans les zones-frontières. Ne pouvant plus monter vers le Nord ni descendre vers le Sud, en proie aux violences et aux trafics. « Lors de ce conflit, il y a eu des atrocités, des viols, des tueries, certains migrants ne pouvaient même plus marcher », témoigne Éric Kamden qui travaille à la Maison du migrant de Gao et est actuellement en exil au Niger. Plus de 250 000 Maliens quittent le Nord se dirigeant plus au Sud, jusqu’à Bamako, ou vers le Niger.

La route par le Mali étant désormais inaccessible, le passage par le Niger redevient important pour les migrants qui considèrent que le « Nord » reste, sinon l’eldorado d’antan, du moins un espace où les perspectives d’avenir restent meilleures. « Les migrants paient le prix de la déstabilisation en cherchant à contourner, à se repositionner. Car les raisons pour lesquelles les jeunes Africains allaient chercher un mieux-être ailleurs n’ont pas changé », explique Assane Ba, chargé de mission Migrations internationales au CCFD-Terre Solidaire.

Ces bouleversements géopolitiques majeurs ont non seulement déstabilisé les routes des migrants mais aussi le travail des acteurs de société civile de la sous-région (associations laïques, missions catholiques, associations de migrants) engagés depuis plusieurs années à leurs côtés. Les amis de Gao de l’association Direy Ben ont été obligés de se replier plus au sud du Mali, aidés par la solidarité des autres associations partenaires de la zone, et cherchent à acheminer vers Bamako les migrants bloqués dans le chaos du théâtre des opérations. Les membres de la Caritas de Gao, actuellement en exil à Niamey, cherchent à renforcer les nouveaux relais du Nord-Niger de plus en plus fréquentés (Arlit et Agadez notamment). En Algérie, à Alger : « Rencontre et développement » ; au Maroc, à Oujda : « ABCDS »[[ABCDS : association qui vient en aide aux migrants.]] ou encore en Mauritanie, à Nouadhibou : « la Caritas », font face à de plus en plus d’arrivées de Libye où le conflit communautaire perdure sans médiatisation, mais aussi de toute la sous-région chaque jour un peu plus déstabilisée.

Quelles sont les perspectives, dans ce contexte ébranlé ? « On garde espoir, notamment avec l’intervention de la France au Nord- Mali, mais on a du mal à maîtriser le calendrier. Il est difficile de réussir quelque chose de grand tant que la situation de conf it ne s’apaise pas. Ça mettra du temps, mais on garde espoir », conclut Hassane Boukar, responsable Migrations de l’association Alternatives espaces citoyen (Niger) lors du Forum social mondial de Tunis. La solidarité entre les partenaires, elle, n’a pas été détruite par les armes et sera sans nul doute le ferment essentiel de la reconstruction de la chaîne de travail pour accompagner ces migrants à travers les routes du Sahara.

avec le CCFD - TERRE SOLIDAIRE

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