Au Mozambique, «  la présence de Total a mis les gens en danger »

Publié le 29.10.2023| Mis à jour le 07.11.2023

Daniel Ribeiro, directeur technique et de la recherche chez Justiça Ambiental ! (JA !) – soutenu par le CCFD-Terre Solidaire – dénonce les effets des investissements gaziers sur la population de la province mozambicaine de Cabo Delgado.

Pourquoi êtes-vous venu en Europe rencontrer des politiques, des entreprises et des médias ?

Daniel Ribeiro : Nous voulons alerter l’opinion et les décideurs sur l’impact des projets de production de gaz au nord du Mozambique. Ils ont un effet désastreux sur les droits humains et l’environnement.

800 000 personnes ont fui leurs terres dans la province de Cabo Delgado pour se réfugier, plus au sud, dans la province de Nampula et Niassa. Depuis 2017, ils fuient l’insécurité dans cette région qui connaît de grands projets d’exploitation gazière, menés par les compagnies TotalEnergies, Eni et Exxon.

En quoi ces projets nourrissent-ils l’insécurité ?

D.R. : Ces projets gaziers sont énormes. Ils placent le Mozambique dans les dix premiers producteurs mondiaux. Ils ont été conclus par des proches des élites au pouvoir, sans réelle concertation avec la population locale. Ces projets s’emparent de terres, sans proposer de compensations justes ou d’emplois à une jeunesse désœuvrée, vivant pour la majorité en dessous du seuil de pauvreté.

La frustration de ces populations délaissées depuis trop longtemps par le pouvoir central a nourri des mouvements de rébellion. Ceux-ci ont commencé à attaquer les installations des gaziers dès 2017. Deux ans plus tard, ils faisaient allégeance à l’Etat Islamique.

Les autorités mozambicaines ont constaté que l’armée ne pouvait pas assurer l’ordre. Elles ont alors fait appel aux mercenaires du groupe russe Wagner et sud-africain DAG.

Désormais les forces de sécurité protègent les installations, mais pas la population. En mars 2021, à Palma, une attaque contre les installations de TotalEnergies a fait 1 200 morts. La présence, notamment de Total, a mis les gens en danger ! Une plainte pénale vient d’être déposée en France contre TotalEnergies pour homicide involontaire et non-assistance à personne en danger.

Aujourd’hui, le gouvernement mozambicain veut faire croire que la sécurité est revenue dans cette province afin de favoriser la reprise du projet. Mais, cela est faux !

Ces projets gaziers peuvent-ils servir au développement du Mozambique ?

D.R. : Le gaz produit par ces projets est essentiellement destiné à l’exportation et ne bénéficiera donc pas aux populations locales. Il faut savoir que le pays ne commencera à toucher des bénéfices de ce gaz qu’en 2040 ! A un moment où de toute façon, les pays auront réduit leurs consommations d’énergies fossiles et auront moins besoin de gaz.

En revanche, les mozambicains – très exposés aux effets du changement climatique – vont subir les conséquences de la consommation de ce gaz.

Un exemple : les coûts générés par les deux cyclones subis par le pays en 2019 représentent 75% des bénéfices escomptés (après 2040) de ce projet.

Nous voulons alerter les établissements européens qui ont prêté de l’argent pour ces investissements colossaux. Je suis convaincu, qu’aujourd’hui, avec ce que l’on sait de l’impact négatif des industries extractives sur le changement climatique, un tel projet ne serait plus approuvé par ces mêmes établissements. Tant d’un point de vue écologique que social.

Toutes ces raisons nous poussent à demander à nos interlocuteurs en Europe de désinvestir ces projets.

Recueilli par Pierre Cochez

avec le CCFD - TERRE SOLIDAIRE

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