Cameroun : que se passe-t-il en Extrême-Nord ?

Publié le 31.05.2023| Mis à jour le 26.07.2023

Écoutez Émilie Leroux, chargée de mission Golfe de Guinée au CCFD-Terre Solidaire. Elle nous parle des enjeux humanitaires dans la région de l’Extrême-Nord du Cameroun, ravagée par les attaques de Boko Haram depuis le Nigeria, par les conflits intercommunautaires et par la crise humanitaire. C’est dans ce contexte qu’intervient notre partenaire, le Comité Diocésain de Développement de Maroua-Mokolo (CDD), qui travaille en lien étroit avec le CCFD-Terre Solidaire.

Le 11 mai dernier, le gouvernement camerounais et la communauté humanitaire ont conjointement présenté un plan de réponse humanitaire, de plus de 400 millions de dollars pour répondre aux besoins vitaux de la population. Ce plan survient quelques mois après la sortie du dernier rapport des Nations Unies, estimant le nombre de personnes devant bénéficier d’aide humanitaire au Cameroun à près de 5 millions – soit un.e Camerounais.e sur six. Parmi les personnes en besoin d’assistance humanitaire, plus de 75% des femmes et des enfants.

L’Extrême-Nord sous la menace des groupes armés non-étatiques

La région de l’Extrême-Nord du pays, caractérisée par une importante population située autour du lac Tchad, est particulièrement concernée par le besoin d’assistance humanitaire. Environ de 1,6 millions de personnes de la région sont concernées. À l’heure actuelle, environ 15% de la population est impactée par la crise alimentaire. Cette zone échappe historiquement au contrôle de l’État camerounais, favorisant ainsi l’activité de groupes armés non-étatiques (GANE). Déjà un espace de banditisme, cette région connaît depuis 2013 une montée des violences avec des attaques du groupe djihadiste nigérian Boko Haram.

En raison de ces violences, plus d’un demi-million de personnes ont été déplacées dans les neuf dernières années. Les attaques de Boko Haram sont très déstabilisantes pour toute la zone car elles exacerbent non seulement les conflits intercommunautaires préexistants en développant le lien entre le mouvement djihadiste et les milieux criminels locaux, mais entrainent aussi la concentration des ressources des pouvoirs publics sur la lutte contre le djihadisme.

Une cohésion sociale fragilisée par de multiples tensions

La gestion des ressources naturelles est devenue une source de tensions croissantes ces dernières années, en particulier les ressources hydriques. Le lac Tchad en particulier est un enjeu majeur : ce dernier a perdu 90% de sa superficie durant les trois dernières décennies en raison d’une série de sécheresses. L’accès au lac entraine des affrontements réguliers entre éleveurs et agriculteurs, qui s’étendent ensuite à l’ensemble des communautés.

Ces oppositions entraînent à leur tour d’autres conflits car les nombreuses populations déplacées sont souvent accueillies au sein de communautés déjà fragilisées par un manque de moyens. En mars dernier, plus de 385 000 personnes avaient été déplacées à l’intérieur des frontières camerounaises.

En plus des tensions liées aux ressources naturelles s’ajoutent des tensions plus anciennes liées aux luttes locales pour le pouvoir. Ces luttes sont alimentées par des habitudes de stigmatisation ethnique entre les différents groupes. Les opérations militaires qui suivent les affrontements continuent de marquer le contexte de la région et ont un impact significatif sur les conditions de vie des populations locales.

Évolution du lac Tchad (1963-2007)

Dans ce contexte de tensions et de violences dans l’Extrême-Nord, comment restaurer des liens de confiance au sein des communautés déchirées par le conflit ?

En dépit des défis importants auxquels la région est confrontée, il existe toutefois des perspectives prometteuses. Le Comité Diocésain de Développement de Maroua-Mokolo (CDD), notre partenaire local, travaille depuis maintenant plus de 40 ans sur la question de la cohésion sociale. Faisant le constat qu’un lien de confiance intercommunautaire et avec les autorités camerounaises est primordial pour la construction d’une paix durable, le CDD vise à renforcer la solidarité dans le nord du pays en promouvant l’acceptation mutuelle, l’engagement citoyen et l’intérêt général des communautés.

Pour atteindre ce but, l’organisation forme les décideurs et sensibilise les populations à la pratique du dialogue et accompagne des initiatives intercommunautaires. De la mise en place d’espaces d’interaction à l’appui d’une centaine d’organisations à base communautaire, ces initiatives intercommunautaires prennent des formes variées. Au-delà d’une stabilité géopolitique, ce dialogue entre les différents partis est aussi nécessaire à l’accroissement des communautés locales à prendre leur propre développement en main – principe phare du CDD.

Cependant, les perspectives futures semblent incertaines : avec Boko Haram qui continue ses incursions depuis le Nigeria et la diminution du lac Tchad qui ne semble pas ralentir, le travail du CDD pour une meilleure cohésion sociale en Extrême-Nord du Cameroun semble actuellement plus important que jamais.

Une initiative intercommunautaire du CDD

Pour aller plus loin :

avec le CCFD - TERRE SOLIDAIRE

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