La Vallée de l’Orbiel, la pollution sous les collines verdoyantes

Publié le 26.03.2024

Située à quelques kilomètres au nord de Carcassonne, la vallée de l’Orbiel ressemble à un havre de paix avec ses collines verdoyantes et les vestiges des châteaux cathares de Lastours. Mais, sous cette apparence, se cache une pollution insidieuse et dévastatrice. 

Des bénévoles du CCFD-Terre Solidaire ont accompagné notre partenaire Justiça Nos Trilhos (JNT) qui travaille sur les conséquences de l’exploitation minière au Brésil à la rencontre du collectif “Pour que vive la Vallée de l’Orbiel”. Nous vous partageons leur histoire : celle d’une région prospère devenue un désastre environnemental et humain, un scénario que notre partenaire brésilien ne connait que trop bien. 

Nos Partenaires de Justiça Nos Trihos se sont rendus en Occitanie pour découvrir la région et les défis environnementaux que rencontrent les populations locales.

Un héritage minier

La mine de Salsigne, la richesse de la vallée de l’Orbiel

Depuis le XIXème siècle, la mine de Salsigne est la “mère nourricière” de la Vallée. Elle a employé des générations de travailleurs et a influencé la prospérité de la région et le commerce local.  

Ces anciens wagonnets servaient dans les galeries des mines

Pendant plus d’un siècle, métaux précieux et minerais ont été extraits de la mine de Salsigne. 

OR

120 tonnes

ARGENT

270 tonnes

CUIVRE

400 tones

ARSENIC

500 000 tonnes

L’exploitation minière et ses conséquences toxiques  

A Salsigne, lorsqu’on extrait une tonne de minerai sur un filon, on obtient 6 grammes d’or seulement, mais également 200 kg d’arsenic !

Dans les années 1980, l’exploitation de la mine est reprise par l’Etat et sa gestion se divise entre trois entreprises : SNC Lastours, la SEPS qui incinère des déchets toxiques sans précaution avant d’être liquidée en 1996, et la Société Mine d’Or de Salsigne (MOS) qui utilise la cyanuration pour extraire l’or et abandonne le terrain en 2004.  

Les pratiques des grandes entreprises minières sont les mêmes, quel que soit le continent. Les méthodes employées en France sont semblables à celles utilisées en Amérique latine.

Notre partenaire brésilien de Justiça Nos Trihos.

À partir des années 1990, l’arsenic n’étant plus rentable, il est abandonné sur place avec d’autres métaux lourds, formant des collines artificielles toxiques. 

Cette colline est en réalité un amas de 500 000 tonnes de déchets toxiques recouverts par une solution matérielle “étanche” et revégétalisé par dessus.

À la fermeture définitive de la mine en 2004, aucune obligation n’a été faite aux anciens exploitants de dépolluer le site. Au total, les déchets représentent sur l’ensemble du bassin versant de l’Orbiel 3 000 000 de tonnes de produits toxiques purs, dont 800 000 tonnes d’arsenic. 

Une décharge chimique menaçant la vallée et ses habitants

Les effets durables de la pollution  

C’est une véritable décharge chimique dont les effets toxiques seront actifs pour plusieurs siècles et sur un large territoire. Malgré les tentatives de dissimulation par l’État et les 142 millions d’euros investis pour colmater les stockages, ces actions demeurent insuffisantes face à l’ampleur de la pollution restante. 

Cette immense décharge chimique est lessivée à chaque épisode pluvieux et les eaux ainsi polluées s’écoulent dans l’Orbiel et ses affluents puis dans l’Aude, et enfin descendent jusqu’à la mer Méditerranée…  

Inondations et lessivage : une contamination invisible  

En temps normal, entre 3 et 8 tonnes d’arsenic sont, chaque année, emportées par le vent et la pluie dans l’Orbiel. Lors de précipitations exceptionnelles comme celles du 15 octobre 2018, les taux d’arsenic explosent. 

Certes, l’arsenic est naturellement présent dans la nature, mais ses effets sur l’environnement sont démultipliés lorsqu’il est extrait du sous-sol et réduit en particules très fines. 

Les nappes phréatiques sont également polluées par ce lessivage et par infiltration, avec une avancée de la pollution souterraine estimée à environ 3 mètres par jour. 

Les inondations de 2018 ont causé d’importants dégâts matériels mais sont aussi une deuxième catastrophe silencieuse et invisible : la contamination des sols, des cours d’eau et des nappes phréatiques avec, à plus ou moins long terme, des incidences que l’on mesure encore mal sur la santé des habitants. 

De nombreux villages ont été inondés par une eau contaminée, polluant à son tour les nombreux terrains qu’elle a recouverts. En tout, 20 communes pourraient être directement concernées par ces pollutions. 

Les déchets et l’arsenic laissés suite à l’abandons des anciennes mines continuent de contaminer les sols et les eaux.

Des associations locales se mobilisent après la découverte de la contamination de la cour d’école de Lastours et lancent des analyses plus larges, sur une centaine d’habitants volontaires de la vallée. Les résultats des analyses sont éloquents : 100% des personnes testées sont contaminées.  

Les médecins locaux constatent une recrudescence de cancers digestifs et respiratoires, des maladies de Parkinson et des maladies de Vaquez. Aucune étude sérieuse n’a été réalisée sur ces incidences sur la santé des habitants. 

Dans l’État du Maranhao au Brésil, nos partenaires de JNT nous racontent qu’ils font face à une situation similaire.Nous abritons la plus grande mine de fer à ciel ouvert au monde, dont une partie du minerai est traitée par des hauts-fourneaux dans la ville voisine. […] Les populations locales ne sont malheureusement pas consultées avant le début de l’exploitation minière, et il n’y a aucune prévision concernant les conséquences à long terme sur le territoire après l’exploitation des mines.” 

Face aux inquiétudes, l’État joue les équilibristes

Pour protéger les populations, L’Etat ne nie pas la pollution, sans pour autant reconnaitre sa responsabilité. 

Pour les habitants les plus pauvres, c’est l’accumulation : inondation, pollution, précarité, difficultés d’accès aux soins, absence de transports publics, inertie de l’État… Elles sont assignées en outre à résidence, n’ayant pas les moyens de déménager… 

“Dans notre région, nous racontent nos partenaires de JNT, ce sont principalement les femmes qui subissent les conséquences les plus graves. Elles passent la plupart de leur temps dans les champs, respirent et touchent la terre. Par conséquent, elles sont sujettes à diverses maladies, y compris des affections cutanées, certaines étant encore inconnues auparavant.”.

Vers la réparation et la sensibilisation dans la vallée de l’Orbiel 

Mobilisations judiciaires, scientifiques, politiques et sociales  

Une action en justice est en cours auprès du Tribunal Administratif pour faire cesser l’aggravation des préjudices et réparer la carence fautive de l’État.  

Quarante chercheurs des universités de Toulouse et de Montpellier, se sont également réunis au sein de l’étude Diagnose pour travailler à livrer un diagnostic scientifique complet de la réalité de la pollution liée à l’héritage minier de la Vallée de l’Orbiel.  

L’action politique s’est traduite par des efforts pour établir un schéma national de réponse à ces problématiques. La sénatrice Gisèle Jourda souhaite faire avancer le droit et a obtenu la création d’une commission d’enquête sénatoriale sur la pollution des sols en France.

Le collectif “Pour que vive la Vallée de l’Orbiel” travaille à une mobilisation renouvelée des générations pour sensibiliser à l’importance de la dépollution

L’espérance de voir refleurir la vallée 

Le collectif “Pour que vive la Vallée de l’Orbiel” appuie son action sur le droit de tout homme à vivre dans un environnement sûr, propre, sain et durable, et travaillent à une mobilisation renouvelée des générations, notamment celles qui n’ont pas connu la mine en activité. 

Selon le collectif, ce territoire magnifique a montré sa résilience en continuant à vivre malgré les pollutions. Il mérite qu’une politique sérieuse de sécurisation et de dépollution soit mise rapidement en œuvre. Il faut la décider politiquement et en assumer le coût.  

Pour cela, ils demandent aux autorités à investir massivement dans la sécurisation des sites pollués, leur dépollution, en misant sur des conditions attractives pour inciter les entreprises du secteur à s’engager sur ce territoire. 

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