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Directive sur le devoir de vigilance des entreprises : la proposition enfin dévoilée par la Commission doit impérativement être améliorée
Paris, le 23 février 2022 – Après de nombreux reports, la Commission européenne vient de publier sa proposition de directive imposant aux entreprises un devoir de vigilance en matière d’atteintes aux droits humains et à l’environnement. Si elle marque une première étape attendue de longue date par la société civile, cette proposition présente en l’état une série de lacunes qui menacent sérieusement sa portée. Il revient désormais au Parlement et au Conseil d’améliorer le texte.
Cinq ans après l’adoption de la loi pionnière sur le devoir de vigilance des sociétés-mères et des entreprises donneuses d’ordre, la proposition de la Commission était attendue de toute part depuis l’annonce, en avril 2020, d’une directive sur le sujet par le Commissaire européen à la justice, Didier Reynders. Le Parlement européen avait lui-même, en mars 2021, adopté à une forte majorité une résolution appelant la Commission à légiférer.
Comme la loi française, la proposition de la Commission prévoit de contraindre les entreprises à mettre en place des mesures de prévention des atteintes aux droits humains et à l’environnement commises par leurs filiales, leurs fournisseurs et leurs sous-traitants directs et indirects [1]. En cas de manquement, leur responsabilité pourrait être engagée, et elles pourraient être tenues d’indemniser les personnes affectées.
Si nous saluons la publication de ce texte, il comporte en l’état de nombreuses failles qui pourraient remettre en question l’effectivité du devoir de vigilance. Le lobbying intense des organisations patronales européennes semble avoir laissé sa marque. [2]
En particulier, la proposition repose largement sur l’adoption de codes de conduite par les entreprises, l’insertion de clauses dans les contrats avec leurs fournisseurs et le recours à des audits privés et à des initiatives sectorielles. Or c’est précisément l’inefficacité de ces mesures qui a mené nos organisations, il y a plus de dix ans, à plaider pour un devoir de vigilance contraignant. Ces dispositions sont autant de failles dans lesquelles les entreprises pourraient s’engouffrer pour échapper à toute responsabilité.
Les demandes de la société civile visant à garantir l’accès à la justice et à la réparation pour les personnes affectées n’ont été qu’en partie entendues. Même si les entreprises pourront être tenues responsables en cas de dommage, en l’état actuel du texte, la charge de la preuve repose encore sur les victimes, à qui il revient de démontrer que l’entreprise a manqué à ses obligations. De plus, la possibilité aujourd’hui prévue par loi française de saisir le juge, avant tout dommage, afin qu’il enjoigne à une entreprise de respecter ses obligations de prévention, n’est pas explicitement envisagée dans la proposition de la Commission.
La Commission propose en outre une approche très restrictive en matière environnementale, qui pourrait exclure du champ de la directive certaines atteintes à l’environnement aujourd’hui couvertes par la loi française [3]. Elle se limite à imposer aux entreprises d’établir un plan en matière climatique, et passe donc complètement à côté de l’urgence à réguler les trajectoires climaticides des grandes entreprises.
Enfin, contrairement aux ambitions initiales de la Commission européenne, cette proposition ne prévoit pas non plus de réforme en profondeur de la gouvernance des grandes entreprises.
Après de longs mois d’attente, il revient désormais au Parlement européen et aux Etats membres d’amender la proposition de la Commission et de négocier le texte. Nos organisations continueront de se mobiliser pour que les dispositions finales de la directive permettent de mettre fin à l’impunité des multinationales et facilitent l’accès à la justice pour les personnes affectées.
Notes
[1] La directive proposée s’appliquerait aux entreprises comptant plus de 500 salariés et un chiffre d’affaires annuel supérieur à 150 millions d’euros. Dans certains secteurs à risques (textile, agriculture, extractif), ce seuil serait abaissé. Son champ d’application serait donc bien plus large que celui de la loi française, qui ne concerne actuellement que les grandes entreprises de plus de 5000 salariés en France, ou 10 000 dans le monde.
[2] Voir le rapport “Tirées d’affaire ? Le lobbying des multinationales contre une législation européenne sur le devoir de vigilance”, juin 2021
[3] Les atteintes à l’environnement se limitent, d’une part, à des violations de certaines normes de droit international limitativement énumérées dans une annexe. D’autre part, la Commission retient une approche anthropocentrique du dommage environnemental conditionnée à ce que la dégradation de l’environnement ait des répercussions sur certains droits humains (droit à l’eau, à la santé etc.).
Contacts presse :
- ActionAid France – Maelys Orellana – maelys.orellana@actionaid.org – 06 34 26 54 17
- Amis de la Terre France – Léa Kulinowski – lea.kulinowski@amisdelaterre.org – 07.57.18.68.71
- Amnesty international France – Véronique Tardivel – vtardivel@amnesty.fr – 06 76 94 37 05
- CCFD-Terre Solidaire – Sophie Rebours – s.rebours@ccfd-terresolidaire.org – 07 61 37 38 65
- Collectif Ethique sur l’étiquette – Nayla Ajaltouni – n.ajaltouni@ethique-sur-etiquette.org – 06 62 53 34 56
- Notre Affaire à Tous – Justine Ripoll – justine.ripoll@notreaffaireatous.org – 06 42 21 37 36
- Oxfam France – Stanislas Hannoun – shannoun@oxfamfrance.org – 07 69 17 49 63
- Sherpa – Lucie Chatelain – lucie.chatelain@asso-sherpa.org – 07 80 90 37 97
Note aux rédactions :
- Recommandations de nos organisations ayant porté la loi française sur le devoir de vigilance
Les associations et syndicats membres du Forum citoyen pour la RSE ayant défendu l’adoption de la loi française sur le devoir de vigilance ont publié en décembre 2020 une série de recommandations pour que le législateur européen puisse s’inspirer des forces et corriger les faiblesses du dispositif français.
- Rappel du processus européen en cours sur le devoir de vigilance
Mars 2017 : La loi sur le devoir de vigilance est promulguée en France
Avril 2020 : Didier Reynders, commissaire européen à la justice, annonce une législation européenne sur le sujet
Mars 2021 : Le Parlement européen adopte à 504 voix une résolution qui indique à la Commission la voie à suivre
Juin 2021 : Après la désignation de Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, en tant que co-responsable du texte, la Commission européenne annonce un report de la publication de la proposition de directive à l’automne 2021
Septembre 2021 : La Commission européenne repousse la publication à décembre 2021
Décembre 2021 : Après un nouvel avis négatif du Comité d’examen de la réglementation, la Commission reporte à nouveau la publication en février 2022- Affaires en cours en France
Les plans de vigilance publiés par les entreprises et les différents contentieux engagés sur le fondement de la loi française sur le devoir de vigilance sont compilés sur le site www.plan-vigilance.org.
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Victoire ! Affaire Total Ouganda : la Cour de cassation reconnaît la compétence du tribunal judiciaire
Le 15 décembre 2021 – La Cour de cassation vient de rendre sa décision dans le cadre de l’affaire opposant le géant pétrolier Total à six associations françaises et ougandaises – les Amis de la Terre France, Survie, AFIEGO, CRED, NAPE et NAVODA -, qui constitue la première action en justice sur le fondement de la loi sur le devoir de vigilance des multinationales.
Clôturant près de deux ans de bataille procédurale, la juridiction suprême a donné raison aux associations en rejetant la compétence des tribunaux de commerce (1). Alors que les violations perdurent et se multiplient sur le terrain, l’affaire va donc retourner en première instance pour être enfin examinée au fond par un tribunal judiciaire.
Après une décision du tribunal judiciaire de Nanterre en janvier 2020, qui s’était déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce, et sa confirmation en décembre 2020 par la Cour d’appel de Versailles (2), les Amis de la Terre France, Survie et leurs quatre partenaires ougandais avaient décidé début 2021 de se pourvoir en cassation, avec le soutien, sur cette question de la compétence, d’ActionAid France, du CCFD-Terre Solidaire, du Collectif Éthique sur l’étiquette et de la CFDT.
Pour les associations, la décision rendue aujourd’hui par la Cour de cassation, donnant compétence au tribunal judiciaire, est une victoire importante. La Cour a tranché en faveur des associations en reconnaissant le “droit d’option” dont celles-ci bénéficient en tant que requérantes non commerçantes (3). En confiant l’affaire au tribunal judiciaire, cette décision permet de s’inscrire dans l’esprit de la loi sur le devoir de vigilance. En effet, cette loi a pour objectif de rendre les entreprises responsables des impacts de leurs activités sur les tiers que sont les salarié-e-s de ses filiales, fournisseurs et sous-traitants, les communautés locales ou encore l’environnement. Alors que le tribunal de commerce tire sa légitimité de la connaissance du monde des affaires, il s’agit ici d’enjeux externes, de protection des droits humains et de la planète, qui ne peuvent être réduits à un litige purement commercial.
De plus, cette décision s’inscrit dans la même logique que l’article adopté il y a peu par le Parlement dans le cadre de la loi sur la Confiance dans l’institution judiciaire – qui sera bientôt promulguée -, donnant dorénavant compétence au tribunal judiciaire de Paris pour toutes les affaires fondées sur la loi sur le devoir de vigilance (4).
Pour Juliette Renaud, des Amis de la Terre France, « Nous sommes soulagés par cette décision de la Cour de cassation, qui vient enfin clôturer près de deux longues années de bataille de procédure. Nous sommes cependant très inquiets par les délais que cette question a engendrés : pendant ce temps, selon nos enquêtes, plus de 100 000 personnes sont toujours privées totalement ou partiellement de leurs terres et de leurs moyens de subsistance en Ouganda et en Tanzanie (5). Il y a urgence à agir, et nous espérons que la décision à venir sur le fond permettra d’ordonner à Total de prendre enfin des mesures concrètes pour faire cesser ces violations ».
Pour Thomas Bart, de Survie, « Cette décision constitue une première victoire dans la longue bataille judiciaire que nous avons engagée contre la multinationale. Nous allons enfin pouvoir nous concentrer sur le fond de l’affaire. Malgré les alertes répétées de la société civile, le projet continue d’avancer à marche forcée sans se soucier de la répression des opposants sur le terrain : nos partenaires et les membres de communautés qui osent élever leurs voix contre ce mégaprojet pétrolier font l’objet d’intimidations croissantes et les arrestations arbitraires se multiplient (6) ».
Cette décision de la Cour de cassation renvoie l’affaire au tribunal judiciaire de Nanterre, où une audience, portant enfin sur le fond de l’affaire, devrait donc se tenir dans les prochains mois.
Contacts presse :
• Amis de la Terre France : Juliette Renaud, +33 6 37 65 56 40, juliette.renaud@amisdelaterre.org
• Survie : Thomas Bart, +33 7 70 06 90 53, thomas.bart@protonmail.com
• ActionAid France- Peuples Solidaires : Maelys Orellana, maelys.Orellana@actionaid.org
• CCFD-Terre Solidaire : Sophie Rebours, + 33 7 61 37 38 65, s.rebours@ccfd-terresolidaire.org
• Collectif Ethique sur l’étiquette : Nayla Ajaltouni, +33 6 62 53 34 56,
n.ajaltouni@ethique-sur-etiquette.org1. La décision de la Cour de cassation est disponible ici.
2. Voir le communiqué de nos associations le 10 décembre 2020 : “Affaire Total Ouganda : la cour d’appel de Versailles renvoie au tribunal de commerce“. Pour en savoir plus sur l’historique de cette action en justice, lire la note des Amis de la Terre et Survie (octobre 2020) : Total Ouganda – Première action en justice sur le devoir de vigilance des multinationales : où en est-on ?
3. Selon le droit d’option, si le requérant est non commerçant, comme c’est le cas de nos associations, il peut choisir de porter un litige contre une société commerciale devant le tribunal judiciaire ou devant le tribunal de commerce. En novembre 2020, ce principe a été réaffirmé par la Cour de cassation dans l’arrêt “Uber”, même dans le cas où le litige avait un lien direct avec la gestion (arrêt disponible ici). C’est sur cet arrêt que s’était appuyé le tribunal judiciaire de Nanterre dans l’affaire “Total climat”, également fondée sur la loi sur le devoir de vigilance.
4. Voir le communiqué de nos associations le 21 octobre 2021 : Attribution de la compétence à un tribunal judiciaire : les parlementaires sauvent l’esprit de la loi sur le devoir de vigilance !
5. Voir l’enquête des Amis de la Terre France et Survie (octobre 2020) :Un cauchemar nommé Total – Une multiplication alarmante des violations des droits humains en Ouganda et en Tanzanie
6. Voir le reportage du Monde, publié le 26 novembre 2021 : “En Ouganda, le pétrole de Total impose le silence et la peur”
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La directive sur la transparence fiscale vidée de sa substance [Tribune]
Les député-es européen-nes vont adopter une directive sur la transparence fiscale des grandes entreprises multinationales, dont le contenu a été tellement affaibli qu’elle ne permettra pas de répondre à son objectif : faire apparaître les montages d’évasion fiscale.
C’est une immense déception pour nos organisations engagées pour la justice fiscale. Plus encore, c’est une véritable occasion manquée pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale des grands groupes, qui privent les Etats de ressources cruciales pour lutter contre les inégalités et les dérèglements climatiques. La France a une forte responsabilité dans cet échec, en adoptant sans nuance les positions des lobbys du secteur privé.
La transparence fiscale des multinationales, grâce au « reporting pays-par-pays public », est pourtant une mesure simple et indispensable pour lutter contre l’évasion fiscale. En obligeant les grands groupes à publier des informations de base sur leurs activités et les impôts qu’elles payent dans chacun des pays où elles opèrent, comme le font déjà les banques, cette mesure doit permettre de vérifier que les impôts payés correspondent à des activités réelles et d’identifier les montages d’évasion fiscale.
« Plus des trois-quarts des pays du monde ne seront pas couverts »
Malheureusement, la directive en cours d’adoption prévoit que les entreprises devront uniquement déclarer leurs activités au sein des pays de l’Union européenne et des pays listés comme paradis fiscaux. Cette restriction géographique anéantit complètement la mesure : plus des trois-quarts des pays du monde ne seront pas couverts. Ceci, alors qu’une seule filiale dans un paradis fiscal suffit pour faire de l’évasion fiscale, et que la liste européenne de paradis fiscaux est défaillante. Les multinationales pourront donc continuer et adapter leurs montages en toute opacité pour échapper à l’impôt. Les citoyens et citoyennes, en particulier des pays en développement qui sont davantage victimes de l’évasion fiscale des multinationales étrangères, n’auront toujours pas d’accès aux informations.
En outre, poursuivant le détricotage de cette directive qui n’a de “reporting pays-par-pays public” que le nom, les négociateurs ont ajouté une faille qui permettra aux entreprises de ne pas divulguer des informations pendant cinq ans si elles les considèrent comme “commercialement sensibles”.
Une fois de plus, la protection de la « compétitivité des multinationales » a pris le pas sur une mesure d’intérêt général
Les informations publiées dans le cadre du reporting public ne sont pas des informations sensibles : les très grandes entreprises, celles concernées par la directive, disposent déjà de ces informations sur leurs concurrents. Un tel recul, au nom de la compétitivité – argument ressassé et éculé par certaines entreprises multinationales pourtant mises en cause dans les scandales d’évasion fiscale successifs, est inacceptable.
Alors que les négociations entre les Etats Membres et le Parlement auraient pu permettre d’améliorer la directive, la France a empêché tout progrès en diffusant ses lignes rouges sur la base d’un document rédigé directement par le MEDEF, sans nuance et avec des arguments erronés. Une fois de plus, la protection de la « compétitivité des multinationales » a pris le pas sur une mesure d’intérêt général et la France a été hélas l’artisane d’un recul majeur.
Le combat pour une véritable transparence fiscale va continuer puisque les Etats devront ensuite transposer cette directive dans leur législation nationale. Alors que la présidence française du conseil de l’Union européenne est sur le point de débuter, la France pourrait alors choisir de reprendre une position de championne de la transparence fiscale ! Nous sommes plus que jamais mobilisé-e-s pour que l’on puisse enfin savoir si les multinationales paient leur juste part d’impôt.
Signatures :
Nadège Buquet, déléguée générale, Transparency International France
Chantal Cutajar, Présidente, OCTFI
Manuèle Derolez, déléguée générale, CCFD-Terre Solidaire
Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France
Franceline Lepany, Présidente de Sherpa
Raphaël Pradeau, porte-parole d’Attac France
Elise Van Beneden, présidente d’Anticor -
Devoir de vigilance : un sondage révèle le soutien massif de l’opinion publique européenne pour mettre fin à l’impunité des multinationales
Plus de 80 % des citoyen·nes européen·nes souhaitent des législations ambitieuses afin de tenir les entreprises juridiquement responsables de violations des droits humains et les atteintes à l’environnement qu’elles commettent, notamment à l’étranger. Selon un sondage YouGov publié aujourd’hui, les citoyen.nes européen.nes estiment également que les personnes affectées par de telles violations doivent pouvoir poursuivre les entreprises responsables devant les tribunaux européens.
Communiqué de presse de : ActionAid France-Peuple Solidaires, les Amis de la Terre France, Amnesty International France, le CCFD-Terre Solidaire, le collectif Ethique sur l’étiquette, Notre Affaire à Tous et Sherpa
Ces résultats issus de neuf Etats de l’Union Européenne (UE) surviennent alors que la Commission européenne s’apprête à publier une proposition de directive sur le devoir de vigilance en matière de droits humains et d’environnement. Celle-cis’appliquerait aux activités des filiales, fournisseurs et sous-traitants des entreprises opérant dans l’UE[1] . La publication de ce sondage intervient également dix jours avant une nouvelle session de négociation à l’ONU autour du projet de traité sur les multinationales et les droits humains.
Le sondage révèle un soutien très majoritaire des citoyen.nes au sein des neuf États de l’UE interrogés, parmi lesquels l’Allemagne, la France, la République tchèque et la Slovénie.
En France, les résultats de ce sondage sont particulièrement éloquents[2] :
- 85 % des citoyen·nes sont favorables à ce que les entreprises soient légalement tenues de s’assurer qu’elles ne sont pas impliquées dans des violations des droits humains, telles que le travail forcé ou l’accaparement de terres.
- 85 % sont favorables à ce que les entreprises soient légalement tenues de s’assurer qu’elles ne contribuent pas à des dommages environnementaux – tels que la pollution de l’air ou la destruction de la biodiversité -, y compris en dehors de l’UE.
- 84 % sont favorables à ce que que la responsabilité juridique des entreprises soit engagée lorsqu’elles causent ou contribuent à des violations de droits humains et à des crimes environnementaux de par le monde.
- après avoir pris connaissance d’exemples d’atteintes aux droits humains et environnementaux en dehors de l’Union européenne, 82 % des personnes interrogées estiment que les victimes de violations en dehors de l’UE devraient pouvoir poursuivre les entreprises impliquées en justice dans les pays européens où ces dernières sont basées.
Nos organisations de défense des droits humains et de l’environnement ont fait des recommandations concrètes pour renforcer les législations en cours de négociation au niveau européen et onusien, afin de mettre fin à l’impunité des multinationales et d’améliorer l’accès à la justice des populations et des travailleur.ses affecté.es[3].
En début d’année, un demi-million de citoyen.nes et plus de 200 organisations ont appelé l’UE à adopter une législation ambitieuse[4]. Le sondage publié aujourd’hui est un nouveau message fort des citoyen.nes aux gouvernements et aux institutions européennes. Ils ne doivent pas céder aux lobbies économiques qui cherchent activement à affaiblir ce nouveau projet de directive et le projet de traité onusien et r d’échapper à leurs responsabilités[5].
[1] Commission européenne :Feuille de route de la « gouvernance durable des entreprises »
[2] Tous les chiffres, sauf indication contraire, proviennent de YouGov Plc. La taille totale de l’échantillon était de 16906 adultes. Le sondage a été effectué entre le 14 et le 29 septembre 2021, en ligne dans les pays suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, France, Irlande, Pays-Bas, République tchèque et Slovénie. Les chiffres ont été pondérés et sont représentatifs de tous les adultes (âgés de 18 ans et plus) des pays concernés.
– Une analyse complète et détaillée des questions et réponses est disponible ici
– Des infographies gratuites sont disponibles ici
Ce sondage a été commandité par les organisations suivantes : AK EUROPA, les Amis de la Terre Europe, l’European Coalition for Corporate Justice (ECCJ), Global Witness et SumOfUs.
Il est relayé en France par ActionAid France-Peuple Solidaires, les Amis de la Terre France, Amnesty International France, le CCFD-Terre Solidaire, le collectif Ethique sur l’étiquette, Notre Affaire à Tous et Sherpa.[3] Voir le document de recommandations des organisations de la société civile française, ainsi que le rapport de la coalition européenne ECCJ Suing Goliath (2021). Alors que les violations des droits humains perdurent et que les menaces à celles et ceux qui osent s’opposer au pouvoir des multinationales se multiplient, il y a urgence à agir
[4] Voir le communiqué de presse “Over half a million people tell the EU to hold business accountable”, février 2021
[5] Voir le rapport Tirées d’affaire ? Le lobbying des multinationales contre une législation européenne sur le devoir de vigilance (2021) ; ainsi que le rapport Impunité made in Europe – Les liaisons dangereuses de l’UE et des lobbies contre le traité ONU sur les multinationales (2018)
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Réaction du CCFD-Terre Solidaire aux annonces du G20 Finances sur les réformes fiscales internationales
Les ministres des Finances des pays du G20, réunis à Venise, ont annoncé leur soutien aux négociations fiscales en cours à l’OCDE, dans la suite de la déclaration du Cadre inclusif de la semaine dernière et du G7 de juin. Les discussions vont continuer jusqu’en octobre pour finaliser l’accord, dont certains éléments, notamment le taux minimum effectif, font encore l’objet de négociations. Cependant, le soutien du G20 ne doit pas masquer les grandes lacunes de l’accord proposé, qui va bénéficier nettement aux pays les plus riches, au détriment des pays en développement.
Pour Lison Rehbinder, chargée de plaidoyer au CCFD-Terre Solidaire : « L’accord en négociations est très problématique tant sur son ambition pour imposer les multinationales en fonction de leurs activités réelles, que sur son impact déséquilibré sur les pays du Sud. ».
Une véritable refonte du système fiscal devrait permettre d’imposer les multinationales là où elles ont leurs activités, pas en fonction de leurs sièges sociaux ou uniquement de leurs ventes. Pourtant, les règles en négociations vont avantager avant tout les pays des maisons-mère des multinationales et les pays de marché, les Etats du G7 devraient donc récupérer 60% des recettes supplémentaires. Les pays en développement, qui accueillent bien des activités de multinationales sur leurs territoires, seront lésés.
« Cela conduirait tout simplement à renforcer les inégalités entre Etats les plus riches et les plus pauvres de la planète : c’est tout à fait injuste et c’est inacceptable, qui plus est pendant une crise mondiale. »
« Par ailleurs, si le taux d’imposition minimum effectif reste défini à 15%, cela risque de graver dans le marbre une faible imposition des multinationales et une course à la baisse des taux, alors que les Etats ont besoin de recettes fiscales pour faire face aux grands défis actuels, comme la réduction des inégalités et les dérèglements climatiques » conclut Lison Rehbinder.
Contacts :
Sophie Rebours : 07 61 37 38 65 – s.rebours@ccfd-terresolidaire.org
Lison Rehbinder : 06 31 29 11 60 – l.rehbinder@ccfd-terresolidaire.orgNotes aux rédactions
– Ces dernières semaines, malgré une déclaration du Cadre Inclusif signée par la plupart des Etats membres des négociations, plusieurs Etats émergents ou en développement, comme l’Argentine ou l’Inde ont fait connaître leurs réserves sur l’accord en discussion, tandis que le Nigéria et le Kenya n’ont pas signé la déclaration. L’ATAF, qui coordonne les administrations fiscales africaines, a rappelé dans son analyse de la déclaration OCDE, que « des pressions politiques ne devraient pas être exercées sur les pays pour qu’ils appliquent ces règles ou rejoignent le Cadre Inclusif ». Des ONG africaines ont appelé leurs gouvernements à rejeter l’accord.
– Précédentes réactions du CCFD-Terre Solidaire sur ces négociations :
suite au communiqué du G7 du 5 juin 2021
suite à la déclaration du cadre inclusif de l’OCDE du 1er juillet. -
Pétition pour demander la suspension du projet d’EDF sur les terres zapotèques au Mexique
Nous ne voulons pas être complices de la violation des droits humains de la communauté zapotèque à Unión Hidalgo en payant notre électricité. Faisons entendre notre voix auprès d’EDF et de l’Etat français!
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ONG et syndicats européens appellent à repenser d’urgence le projet de transparence fiscale des entreprises
62 organisations de la société civile et syndicats ont tiré aujourd’hui la sonnette d’alarme sur le projet visant à affaiblir considérablement la législation européenne qui obligerait les entreprises multinationales à divulguer, au niveau mondial et pays par pays, où elles paient leurs impôts (ce que l’on appelle le reporting pays-par-pays public ou « pCBCR »).
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Eoliennes EDF : 3 questions à Alejandra Ancheita qui lutte contre l’impunité des multinationales au Mexique
Pour cette défenseuse des droits humains, l’entreprise française, interpellée depuis des mois, ne peut pas ignorer l’impact social et économique de la construction de son parc éolien Gunaa Sicarú sur les communautés zapotèques de l’État de Oaxaca, sur la côte pacifique du Mexique.
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L’évasion fiscale coûte 427 milliards de dollars chaque année dans le monde
Les Etats perdent 427 milliards de dollars chaque année à cause de l’évasion fiscale des multinationales et de la fraude internationale des individus, l’équivalent du salaire annuel de 34 millions d’infirmières-ers dans le monde, révèle un nouveau rapport.
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Une communauté autochtone au Mexique se bat pour qu’EDF respecte ses droits
EDF ignore son devoir de vigilance et les droits des communautés autochtones mexicaines dans le cadre d’un projet de parc éolien. Swann Bommier, chargé de plaidoyer au CCFD-Terre Solidaire, nous parle du combat de la communauté d’Unión Hidalgo pour faire respecter ses droits.
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Mexique : elle défend les droits de sa communauté zapotèque face à EDF
Guadalupe Ramiréz, 69 ans, vit à Unión Hidalgo, communauté autochtone zapotèque de 14 000 habitants située sur le littoral pacifique dans l’État de Oaxaca (Sud-Est de Mexico). Elle s’oppose aux projets de parcs éoliens, comme celui que prévoit EDF, qui envahissent ce territoire sans considération des droits élémentaires de la population. Elle raconte les menaces, la peur et le combat pour défendre leurs droits malgré tout
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La synthèse : EDF assigné en justice par une communauté autochtone mexicaine
EDF prévoit de construire un parc éolien sur les terres de la communauté autochtone d’Unión Hidalgo au Mexique. Cette communauté lui reproche de ne pas l’avoir consultée correctement sur l’utilisation de ses terres, ce qui constitue une violation flagrante de ses droits fondamentaux. Avec l’assignation d’EDF devant le tribunal judiciaire de Paris, elle espère obtenir le respect de leurs droits
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Edito de Faim et Développement – Les actes de résistance manifestent l’espoir des peuples
Automne 2020, la crise sanitaire mondiale du Covid-19 reste toujours d’actualité. La menace de ce virus a modifié profondément nos interactions sociales, notre rapport au travail, à la culture, l’accès à la formation ou à l’emploi, notre faculté à nous déplacer hors de nos frontières…
La politique sanitaire dicte les cadres et pose des barrières à tous ces aspects de nos vies. Mais il est un domaine où nous n’avons peut-être pas mesuré encore l’impact de cette pandémie : ses conséquences sur le respect des droits humains.
C’est le sujet que nous avons choisi de traiter dans ce numéro de Faim et Développement, alerté par nos partenaires sur les exactions dont ils sont aujourd’hui victimes.
En Inde ou au Brésil, dans les Balkans, au Liban ou aux Philippines, au Nicaragua comme au Burundi, en Israël ou en Thaïlande… Partout, la crise sanitaire a servi de faire-valoir à des chefs d’État et des régimes autoritaires pour restreindre encore davantage les libertés, brider la démocratie, opprimer les plus vulnérables. Le virus ne se contente pas de tuer des personnes, il est aussi l’arme absolue des dictateurs pour faire disparaître tous les espoirs de démocratie.
Pourtant, aujourd’hui, des voix s’élèvent pour dénoncer ces situations perverses. Les évêques sont de plus en plus nombreux à interpeller leurs gouvernements et à demander la protection des populations, encouragés à s’engager par le pape François (aux Philippines, à Hong Kong, au Brésil, en République démocratique du Congo, etc.)
Les organisations locales de citoyens continuent leurs actions, malgré les actes d’intimidation quotidiens, les menaces, voire la répression. Nos partenaires accomplissent un travail de veille et de circulation de l’information comme Focus on the Global South en Asie du Sud-Est. Ils continuent à promouvoir une société de paix et de dialogue comme Sadaka-Reut en Israël. Ils poursuivent leur engagement pour le respect des droits des paysans, comme la Commission pastorale de la terre au Brésil. Ils s’engagent dans l’aide aux migrants comme SOS Méditerranée qui a repris ses missions de sauvetage.
Cet été, le CCFD-Terre Solidaire a aussi été sollicité par ses partenaires du Liban après la catastrophe qui a à nouveau meurtri le pays. Sans ces associations, engagées dans l’aide aux victimes, rien ne serait entrepris. Face à un système politique inapte et corrompu, l’avenir du Liban se construira par et avec les Libanais. Toutes ces actions de terrain, ancrées dans les réalités, sont des actes de résistance et la manifestation de l’espoir des peuples. En France et en Europe aussi, nous sommes appelés à nous mobiliser pour faire naître un monde juste et solidaire. C’est dans cet esprit que le CCFD-Terre Solidaire poursuit son engagement pour obtenir des règles de régulation des multinationales. Là aussi, 120 évêques du monde entier se sont engagés pour soutenir l’adoption d’un traité à l’Onu sur ce sujet. Les entreprises à l’étranger doivent pouvoir répondre de leurs actes en matière de respect des droits des populations et de préservation de la planète. La loi sur le devoir de vigilance a marqué un premier pas en ce sens. Encore faut-il garantir sa mise en oeuvre. Face aux manques de contrôle de l’État, le CCFD-Terre Solidaire a choisi, avec son allié Sherpa, de publier chaque une année un rapport dressant l’état des lieux.
« Si la politique n’est pas capable de rompre une logique perverse et, de plus, reste enfermée dans des discours appauvris, nous continuerons à ne pas faire face aux grands problèmes de l’humanité. » Répondant à cet appel du pape François (Laudato Si’), nous voulons mettre l’humain au coeur de tout. Et la pandémie ne fera pas obstacle à notre engagement.
Par Manuèle Derolez, Déléguée générale du CCFD-Terre Solidaire
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L’application de la loi sur le devoir de vigilance passée au radar : 27% des entreprises hors la loi ?
Comment s’assurer que les entreprises visées par la loi sur le devoir de vigilance établissent, publient et mettent en œuvre un plan de vigilance ?
Avec Sherpa et Datactvist, nous avons mis en place un outil de suivi de cette loi, le radar du devoir de vigilance. Résultat, aujourd’hui Yves Rocher, Castorama, Picard, McDonald’s France, France Télévisions, Bigard et d’autres grosses entreprises n’ont pas mis en place de plan de vigilance