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Lettre ouverte : l’Europe a besoin de plus de paysannes et de paysans
À : M. le vice-président exécutif Frans Timmermans Commissaire Stella Kyriakides Commissaire Janusz Wojciechowski Commissaire Virginijus Sinkevičius Monsieur le vice-président exécutif, Madame la commissaire, Messieurs les commissaires, Le 17 avril est célébrée la Journée internationale des luttes paysannes. En ce jour, nous commémorons le massacre de 21 paysans sans terre en 1996 à Eldorado dos Carajás, au Brésil, alors qu’ils et elles manifestaient en faveur d’une réforme agraire cohérente. Cette journée est importante pour l’Europe, où l’agriculture paysanne représente la majorité des fermes et offre des modèles économiques équitables et durables. Au sein de l’UE, malgré la diminution du nombre de fermes et la concentration croissante des terres dans les mains de quelques-uns, l’agriculture reste majoritairement une agriculture de petite échelle. Selon des rapports publiés en 2015 et 2016, 11_885_000 (97%) fermes sont inférieures à 100ha[[Van der Ploeg, J.D. 2016. Family farming in Europe and Central Asia: history, characteristics, threats and potentials. FAO working paper 153. (Les expoitations familiales en Europe et en Asie centrale : histoire, caractéristiques, menaces et atouts. Document de travail 153 de la FAO) Disponible sur: www.ipc-undp.org]] et 69 % sont inférieures à 5ha[[Données Eurostat reprises dans : ECVC, Confédération paysanne et Envie de paysans! 2015. How can public policy support small-scale family farms? (Comment la politique publique peut-elle soutenir les petites fermes familiales ?)]]. Ces petites fermes, et les personnes qui y travaillent, sont la clé des fondements mêmes de toute agriculture : les systèmes semenciers paysans, d’où sont nées toutes les semences, le travail et la conservation de la terre pour qu’elle soit fertile et diversifiée et la transmission de connaissances qui ont réussi à nourrir la population depuis des milliers d’années. Un système alimentaire durable – capable de garantir une alimentation saine à l’ensemble de la population, de revigorer les zones rurales et de préserver la diversité territoriale, biologique et culturelle – a donc besoin de davantage de paysannes et de paysans. Aujourd’hui, dans une lettre signée par des organisations paysannes, des alliés et des universitaires, nous soulignons le rôle clé des petites et moyennes fermes paysannes dans la résolution des crises sociales, environnementales et alimentaires actuelles à différentes échelles et à différents niveaux. Nous sommes à la croisée des chemins : – la pandémie COVID-19 est en cours et il est impossible d’en prévoir la fin ; – la réforme de la PAC est en trilogue et les plans stratégiques nationaux sont en cours d’élaboration ; – l’Union Européenne met en œuvre le Pacte vert pour l’Europe avec la proposition de Loi loi européenne sur le climat, la stratégie Biodiversité et la stratégie « De la ferme à la table ». Il est temps de transformer ces objectifs en actions cohérentes. La pandémie de COVID-19 nous rappelle qu’il est absolument nécessaire de reconstruire notre résilience et de progresser vers la souveraineté alimentaire. L’Union Européenne doit devenir résiliente face à ces chocs en retrouvant la capacité politique de décider et de réguler les marchés agricoles et alimentaires. Il faut d’abord revoir en profondeur la politique commerciale internationale de l’Europe, qui empêche aujourd’hui la création de politiques publiques sérieuses visant à améliorer les systèmes alimentaires en termes de qualité, de sécurité alimentaire, de soutenabilité environnementale, d’inclusion sociale et de développement rural. Nous demandons également une politique alimentaire européenne commune, soutenue par un Conseil Alimentaire Commun qui échangerait avec les conseils alimentaires locaux.Dans le cadre de son plan d’urgence, l’UE doit mettre en œuvre une stratégie de résilience alimentaire au niveau des territoires européens, développée conjointement avec les organisations paysannes et les communautés locales. Cela implique également une répartition plus équitable des ressources agricoles, une politique de relocalisation durable de la production et de la commercialisation, et la création de réserves alimentaires stratégiques. Plus que jamais, il est nécessaire de privilégier et de renforcer l’autonomie financière, les droits et l’accès aux ressources liées à la production, telles que les semences, et l’autonomie en matière d’outils et de techniques pour les paysannes et les paysans. En outre, il est nécessaire de soutenir les fermes paysannes agroécologiques, qui ont déjà prouvé leur résilience pendant la crise, et ont démontré la qualité, la cohérence et la quantité de la production qu’elles offrent. * Le nombre de petits paysan.ne.s doit augmenter, et les fermes-usines doivent être clairement interdites en Europe. En ce moment même, les trois principales institutions de l’UE finalisent la réforme de la PAC post-2020. Il n’y a aucune excuse pour ne pas intégrer pour la première fois la conditionnalité sociale et mettre en œuvre une distribution plus équitable des subventions. En effet, les mesures de régulation du marché sont essentielles pour obtenir des prix qui couvrent les coûts d’une production saine et durable, et les subventions de la PAC ne doivent pas être distribuées en fonction des hectares, mais plutôt en fonction du travail réel des paysan.ne.s. Les outils de plafonnement et de paiement redistributif des aides doivent être contraignants et garantir que cette répartition soit plus équitable. Ils doivent également exiger le respect des droits sociaux et du travail, ce qui est également crucial dans le cadre de la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP) au niveau de l’UE. Cette mise en œuvre reconnaîtrait les droits d’accès à l’emploi, à la sécurité sociale, au logement, à la santé et à des salaires équitables pour tous les travailleur.euse.s ruraux.ales, y compris les migrant.e.s. L’immense défi du changement climatique peut-être résolu grâce à l’agroécologie et à une augmentation du nombre de paysan.ne.s travaillant les terres. Nous vous demandons avant tout de mettre en place des mesures permettant de réellement diminuer les émissions de gaz à effet de serre, au lieu de mettre en place des mécanismes de compensation. Au niveau des fermes, plusieurs études montrent que l’absorption des gaz à effet de serre par le sol est beaucoup plus efficace lorsqu’il est travaillé selon les principes de l’agroécologie. Celle-ci maximise la biodiversité et stimule les interactions entre les différentes espèces végétales et animales dans le cadre de stratégies holistiques visant à établir une fertilité à long terme, à réduire les risques de parasites et de maladies, à protéger les systèmes d’eau douce et à garantir les services de pollinisation. Non seulement l’agroécologie protège des agroécosystèmes sains, mais elle implique également la présence de nombreux.euse.s travailleur.euse.s qui assurent leur gagne-pain et leurs droits. Une fois de plus, les petites fermes doivent être soutenues. Par conséquent, à un niveau plus large, les importations et les exportations de produits agricoles doivent également être réduites de manière drastique, et la production régionale doit être encouragée. Tous les produits agricoles entrant dans l’UE doivent répondre aux mêmes normes sociales et environnementales que celles appliquées à la production européenne, il s’agit d’une priorité.
Puisque la question de la numérisation et des nouvelles technologies dans l’agriculture est omniprésente dans les débats politiques actuels : il faut être clair : la technologie ne doit pas conduire à la désertification des zones rurales. Lorsqu’elles sont élaborées et dirigées par des agriculteur.rice.s, utilisées avec soin et respect, et avec des mécanismes de décision démocratiques, les technologies sont utiles. Toutefois, la technologie de précision ne doit pas être considérée comme une solution automatique et efficace à tous les problèmes économiques, sociaux et environnementaux. Dans la plupart des cas, elles renforcent intentionnellement ou de facto les modèles agricoles les plus industriels et les plus polluants. Les incitations aux technologies numériques coûteuses et privées forcent les paysan.ne.s à s’endetter de manière ingérable, à être dépendant.e.s de l’industrie et, en fin de compte, réduisent l’emploi rural agricole, sans tenir compte des impacts sociaux et environnementaux. Les paysan.ne.s doivent également avoir les moyens de garantir la sécurité et le contrôle de leurs données, et il faut fermement appliquer le principe de précaution et d’information pour toute promotion de nouvelles innovations. Les impacts sociaux et environnementaux doivent être étudiés sur le long terme et les résultats doivent être librement diffusés. Nous demandons la création d’un observatoire pour suivre ces impacts. Les débats en cours sur la réglementation des nouveaux et anciens organismes génétiquement modifiés sont également alarmants. Ces dernières années, l’industrie biotechnologique a mené une vaste campagne de communication pour supprimer la réglementation et l’étiquetage des nouveaux OGM, que certains appellent à tort « nouvelles techniques de sélection végétale » afin de semer la confusion dans l’esprit des citoyens. Pourtant, contrairement à ce qui est communiqué, ces technologies ne sont pas adaptées à une agriculture durable. Pour les organisations paysannes, ces solutions agronomiques facilitent non seulement la concentration du pouvoir par le biais des brevets dans le secteur des semences, en contradiction flagrante avec les droits des paysan.ne.s aux semences, mais elles ne sont pas axées sur une recherche agricole basée sur l’adaptation, mais plutôt sur une orientation génétique contre nature qui veut optimiser un modèle agricole basé sur la monoculture et qui pousse les phytopathogènes à muter rapidement et à devenir encore plus dangereux, augmentant ainsi l’utilisation des pesticides au lieu de la diminuer. Nous demandons que la directive 2001/18/CE soit fermement maintenue et que le droit des paysan.ne.s aux semences soit reconnu dans la future réforme de la loi sur la commercialisation des semences. L’accès au foncier agricole doit aussi être facilité pour permettre l’installation de nombreux nouveaux paysans et paysannes. De nombreuses fermes seront à céder dans les années à venir, dû au vieillissement de la population agricole en Europe : en fonction des mesures qui seront prises ou non sur le foncier agricole, cela peut conduire ou bien à une concentration et à une désertification rurale, ou bien à la transition agroécologique dont nous avons tant besoin. La terre ne doit plus être traitée comme une marchandise, mais comme un bien commun et multifonctionnel. Nous vous demandons de donner suite au rapport INI du Parlement européen 2016/2141, et d’établir une directive foncière afin de préciser davantage la réglementation des marchés fonciers agricoles en conformité avec le droit européen. Nous demandons que cette directive soit accompagnée de la création d’un observatoire foncier pour surveiller les transactions foncières – y compris l’impact des accords de partage – et pour bloquer les processus de concentration foncière. Malgré diverses réformes, la PAC continue d’inciter les fermes à accumuler le plus de terres possible, transformant la plus grande ligne de financement de l’UE en un soutien direct aux grandes entreprises, à l’encontre du principe de cohésion territoriale de l’UE. Nous exigeons que les politiques de l’UE placent les paysan.ne.s européen.ne.s au centre. L’UE doit donner le ton au niveau européen et encourager le développement d’une politique foncière nationale, ainsi que faciliter les changements positifs mené par les paysan.ne.s eux-mêmes au niveau municipal. Enfin, en ce 17 avril, nous soulignons que si la mise en œuvre du Pacte Vert pour l’Europe doit réellement « ne laisser personne de côté », l’UE doit respecter, protéger et réaliser les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales en mettant en œuvre de manière cohérente l’UNDROP. Cette déclaration a été adoptée par une large majorité des États membres des Nations unies, avec 121 voix pour, et fait désormais partie du consensus international sur les droits humains. À ce jour, aucun engagement n’a été pris pour mettre ces droits en œuvre dans la politique de l’UE, mais l’UE, de bonne foi, a l’obligation de le faire. Il est temps de prendre des mesures législatives, administratives et autres mesures, afin de parvenir progressivement à la pleine réalisation des droits énoncés dans l’UNDROP, en particulier dans le contexte des négociations actuelles sur la PAC et de la création d’une législation sur le Pacte Vert. Nous sommes tou.te.s concerné.e.s par l’agriculture. Les personnes et les familles à l’origine de l’agriculture portent souvent l’héritage d’expériences uniques, accumulées sur plusieurs générations, qui ont permis de préserver la biodiversité et de faire face au changement climatique, tout en étant en mesure de nourrir le continent avec des aliments frais, sains, locaux, nutritifs et sûrs. Rien de tout cela ne peut être remplacé par des modèles de production qui privilégient le profit et la productivité au détriment de la santé et de la durabilité. L’UE doit cesser de favoriser le modèle de production agricole industrielle à grande échelle qui désavantage les petites et moyennes fermes, et vide les zones rurales. En respectant vos engagements dans le cadre de l’accord de Paris sur le changement climatique, des Objectifs de Développement Durable et de l’UNDROP, en mettant en œuvre la PAC, le Pacte Vert pour l’Europe, en particulier, la stratégie Biodiversité, la stratégie « De la ferme à la table » et la loi européenne sur le climat, vous avez la possibilité de faire de l’Union européenne un exemple à suivre pour le reste du monde : non seulement pour l’agriculture, mais aussi en termes de vivre-ensemble dans un environnement sain, résilient et juste. Nous vous remercions de l’attention que vous porterez à cette lettre. Nous comptons sur vous et restons à votre disposition pour vous accompagner au cours de cette transition. Pour voir tous les signataires téléchargez la lettre fr_17_avril-_lettre_ouverte_-final.pdf Documents joints
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Projet de la Commission sur la PAC après 2013 : des objectifs environnementaux et sociaux qui doivent être confirmés
Paris, le 18 octobre 2010 – Une proposition pour une PAC plus juste et plus équitable dont les objectifs sont réorientés vers l’environnement, le changement climatique et l’emploi Nos organisations accueillent avec grand intérêt les premières intentions de la Commission de rendre les futurs soutiens de la PAC plus équitables, mieux répartis à la fois entre les agriculteurs et les Etats membres, et davantage ciblés sur l’environnement et l’emploi. Ces intentions reflètent aussi une vision politique nouvelle de la diversité des agricultures de l’UE-27, où le rôle des petites fermes et des produits locaux est enfin reconnu. Les propositions de la Commission, qui doivent toutefois être confirmées le 17 novembre, sont de nature à mieux légitimer les paiements directs et le maintien d’une PAC forte dans le cadre de la révision du budget européen. – Des propositions de la Commission qui contrastent avec celles de la France Ces nouveaux objectifs visant à renforcer l’intégration de l’environnement dans la PAC tranchent nettement avec la frilosité des autorités françaises – au premier chef le Président de la République – qui souhaitent, quant à elles, un « moratoire » en matière d’obligations environnementales. Il est aujourd’hui évident qu’un tel « moratoire » demandé en France ne préparerait pas l’avenir des agriculteurs français. Cette volonté de rééquilibrage des aides a également suscité des inquiétudes de la part de certaines organisations professionnelles, ce qui n’est pas surprenant dans la mesure où certains secteurs bénéficient bien plus largement des aides que d’autres. La fin des aides historiques soulèvera et soulève déjà une levée de bouclier. La Commission ne doit pas céder à la pression de ceux qui souhaitent conserver leurs « avantages acquis », mais bien continuer à porter un projet de transformation progressive vers une agriculture plus durable et économiquement viable. Or c’est bien en faveur d’une PAC plus juste et plus équitable que s’est exprimée la société civile européenne lors de la consultation organisée par la Commission européenne au printemps. – Des efforts à poursuivre sur l’environnement et des propositions à améliorer sur la régulation des marchés Cependant, la Commission européenne devrait aller plus loin et reconnaître que certains types d’agriculture sont particulièrement bénéfiques pour la santé, l’emploi, l’environnement et la lutte contre le changement climatique – agriculture biologique, systèmes herbagers, agriculture à haute valeur naturelle – et préciser comment elle entend les soutenir, notamment quand elle évoque la rémunération des services environnementaux. Nous nous interrogeons également sur le manque d’ambition du projet de la DG Agri sur la régulation des marchés agricoles, évoquant de simples adaptations potentielles. Or c’est une condition incontournable pour garantir la régularité de l’approvisionnement et la stabilité de prix à la fois rémunérateurs pour les producteurs et abordables pour les consommateurs. L’affaiblissement des instruments de maîtrise et de gestion de l’offre sans alternative tangible au niveau communautaire ne fera qu’accroître les tensions et les perturbations sur les marchés mondiaux, avec pour conséquence une instabilité des prix préjudiciable pour les agricultures familiales européennes comme pour celles des pays du Sud. Concernant les défis de la sécurité alimentaire, nous rappelons que toutes les politiques de l’UE – y compris la PAC – doivent désormais tenir compte de l’objectif de réduction de la pauvreté dans le monde. Par conséquent, nous attendons de la communication de la Commission sur la PAC après 2013 qu’elle soit cohérente avec le développement de l’agriculture familiale dans les pays du Sud : suppression des exportations subventionnées, réduction des importations de protéines végétales… Nos organisations souhaitent que la Commission propose des instruments plus ambitieux à la hauteur des orientations stratégiques affichées en faveur d’une agriculture économiquement productive, riche en emplois et performante sur le plan de l’environnement. Télécharger le communiqué de presse (pdf)Documents joints
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Pour une politique agricole, alimentaire, environnementale et rurale européenne
Paris, le 18 février 2010 LA SOCIÉTÉ CIVILE S’IMPLIQUE DANS LE DEBAT Des organisations françaises agricoles, de solidarité internationale, de développement durable, de protection de l’environnement ainsi que des mouvements ruraux, ont décidé de s’impliquer dans le débat sur l’avenir de la politique agricole commune. Ensemble au sein du « groupe PAC 2013 », elles ont élaboré des propositions qui renouvellent les approches sur la PAC, en rétablissant des liens trop souvent séparés entre l’agriculture, l’alimentation, l’environnement et le développement rural. CONTEXTE ACTUEL AUTOUR DE LA PAC En 2010, débutent les discussions autour de la réforme de la PAC post 2013. Deux niveaux de discussion sont attendus : l’un concerne ses orientations et l’autre son budget. L’enjeu croisé est donc indéniablement la légitimité d’une politique commune qui absorbe aujourd’hui 40 % du budget communautaire. Le nouveau commissaire européen à l’agriculture et au développement rural, M. Dacian Ciolos, a officiellement affirmé son intention de consulter la société civile dans la perspective de la communication de la Commission prévue à l’automne. Enfin, les décisions communautaires intègrent désormais pleinement le Parlement européen, qui orientera lui aussi les débats sur l’avenir de la PAC. NOTRE CONSTAT La prochaine réforme est à haut risque pour la PAC. Nombre de voix s’élèvent déjà pour mettre en cause sa légitimité et demander l’affectation de tout ou partie de son budget vers d’autres politiques (climat, énergie, recherche…). Nos organisations sont profondément convaincues de la nécessité de mobiliser la PAC pour participer aux réponses à apporter aux enjeux européens et mondiaux du début du XXIème siècle. Ces enjeux concernent simultanément la sécurité alimentaire, la protection des ressources naturelles, la lutte contre le changement climatique, le développement rural et l’emploi, tout en étant solidaire avec les pays du Sud. L’avenir de la PAC concerne donc tous les Européens. Nous estimons que si la PAC n’est pas relégitimée et donc profondément refondée, elle risque d’être considérablement affaiblie, voire mise en cause, dans les prochains mois. Nos arguments plaident en faveur d’une nouvelle politique ambitieuse, rénovée et européenne. NOS PROPOSITIONS 1. Mieux organiser les marchés agricoles pour réguler les prix à un niveau rémunérateur, incitatif et stable L’agriculture européenne doit être tournée en priorité vers la satisfaction des besoins de son marché intérieur, ainsi que vers la production de produits à haute valeur ajoutée qui soient exportables sans aides publiques. Il appartient aux pouvoir publics européens de continuer à jouer un rôle dans la limitation des risques de marchés, et donc dans la maîtrise des volumes de production, avec des instruments appropriés qui régulent les prix et assurent des revenus agricoles plus équitables. 2. Définir une PAC réellement cohérente qui ne soit pas préjudiciable à la sécurité alimentaire des pays du Sud L’Union européenne doit rechercher les moyens de permettre aux pays en développement d’approvisionner leur marché intérieur avec des politiques agricoles et commerciales leur garantissant une souveraineté alimentaire. L’avenir de l’agriculture européenne sur les marchés mondiaux passe par une priorité donnée aux produits de qualité à haute valeur ajoutée, et non par des produits qui ne sont exportables qu’avec des subventions. 3. Refonder les paiements directs sur la base de la rémunération des services environnementaux pondérés par l’emploi Une meilleure acceptation de la PAC par l’opinion passe nécessairement par la relégitimation des paiements directs sur la base des services rendus par l’agriculteur à la société dans son ensemble. Ces paiements seraient plus équitables car rémunérant un service, ils soutiendraient uniquement une agriculture durable souvent plus intensive en emplois et favoriseraient le maintien d’un tissu rural nécessaire à la préservation d’agro-écosystèmes bénéfiques pour l’environnement. Ces paiements doivent en outre être pondérés selon le nombre d’actifs par exploitation. 4. Promouvoir une agriculture durable qui contribue efficacement à la lutte contre le changement climatique et qui réponde aux autres défis environnementaux Il est essentiel d’amplifier l’intégration dans la PAC des défis climatiques et énergétiques tant en termes d’atténuation des émissions des systèmes agricoles que d’adaptation. En outre la PAC doit soutenir les modes de production qui favorisent simultanément la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’autonomie énergétique des fermes, une meilleure gestion de l’eau, le maintien de la biodiversité et la fertilité des sols. 5. Soutenir une agriculture durable créatrice d’emplois et garantir la cohésion territoriale afin de favoriser le développement rural Il est nécessaire de recentrer les objectifs de la politique de développement rural sur le maintien et la création d’emplois ainsi que sur la cohésion territoriale. Ceci suppose de maintenir des paiements compensatoires de handicaps naturels, pour prévenir l’abandon des terres et de l’activité agricole dans les zones défavorisées. 6. Intégrer la consommation et l’alimentation au coeur d’une PAC renouvelée Mobiliser la future PAC pour peser sur les modes d’alimentation est essentiel pour mieux répondre aux attentes de la société en terme de qualité et d’accès à l’alimentation, de nutrition et de santé publique. Elle doit aussi agir pour réduire le gaspillage alimentaire. La Pac doit en outre favoriser les circuits courts, et accompagner l’intégration de nourriture de qualité, de saison et d’origine locale dans les restaurants collectifs. Enfin l’Union européenne doit aussi confirmer son soutien aux personnes les plus démunies. Lire les constats, les propositions et leviers d’action (pdf)Documents joints
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Sommet mondial sur la sécurité alimentaire, le CCFD-Terre Solidaire dénonce une coquille vide
Paris, le 16 novembre 2009 A un moment où tous les Etats et les institutions internationales semblaient d’accord pour replacer l’agriculture au cœur du développement et des politiques, la communauté internationale a raté le virage de la responsabilité alimentaire. L’absence consternante des chefs d’Etat des pays riches au Sommet de Rome donne un signal négatif pour la construction du Partenariat mondial pour l’agriculture et la sécurité alimentaire. Les préparatifs du sommet de Copenhague ne doivent pas occulter les enjeux de l’alimentation, alors que la mise en place d’autres modèles agricoles et d’alimentation doivent être au cœur de la construction des réponses au changement climatique. Il semble que seul le Pape Benoît XVI, dans son discours d’ouverture du Sommet, ait soulevé les vraies questions aux racines de la faim : la spéculation, les logiques de profit, les modes de consommation personnels et collectifs. Il a rappelé qu’ « il manque en effet une organisation des institutions économiques qui soit en mesure de bien garantir un accès régulier et adapté à la nourriture…». Certes, les bases sont posées, et le Partenariat est né. Mais, regrette Ambroise Mazal, “ce projet, dont les bases étaient novatrices et prometteuses, se retrouve aujourd’hui n’être qu’une coquille vide, faute d’engagements financiers et politiques, et en l’absence d’objectifs clairs et de calendrier”. Une véritable mobilisation contre la faim doit passer aujourd’hui par un partenariat mondial renforcé, où tous les choix sont posés de manière transparente, en associant tous les acteurs concernés, en y consacrant les moyens financiers nécessaires et en mettant en place un suivi des engagements pris. Le CCFD-Terre Solidaire, et les 500 organisations qu’il soutient à travers le monde, vont poursuivre la mobilisation, et exiger des Etats qu’ils donnent chair à ce nouveau projet de gouvernance alimentaire. Pour construire un monde sans faim, ce partenariat mondial doit vivre. Téléchargez le communiqué de presse (pdf)Documents joints
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Le CCFD-Terre Solidaire participe au Sommet mondial sur la sécurité alimentaire à Rome
Paris, le 13 novembre Première Ong française de développement, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD-Terre Solidaire) participera au Sommet de Rome au sein de la délégation française. Le CCFD-Terre Solidaire se félicite de la tenue de ce Sommet, qui maintient la lutte contre la faim à l’agenda international. Il reste néanmoins extrêmement mobilisé pour que ce rendez-vous n’en reste pas aux déclarations d’intention, mais débouche sur des décisions concrètes. En effet, la faim dans le monde qui touche aujourd’hui une personne sur six n’est pas une fatalité, mais le résultat d’un manque d’engagement concret de la communauté internationale, et de politiques nationales et internationales inadaptées, voire contraires à la sécurité alimentaire. Pour le CCFD-Terre Solidaire la réussite du Sommet de Rome passe nécessairement par :- la création d’un mécanisme de suivi des engagements financiers. La FAO estime par exemple, que 10% seulement des 22 milliards pour la sécurité alimentaire annoncés en juin 2008 à Rome ont été déboursés.
- un engagement des États du Sud à augmenter la part du budget consacrée à l’agriculture (atteindre 10% contre 4% aujourd’hui) et des États du Nord à consacrer 17% de l’Aide publique à ce secteur. Ce renforcement des moyens doit impérativement profiter aux agricultures familiales et au développement des cultures vivrières, incontournables pour lutter contre la faim.
- la remise à plat des politiques nationales et internationales, qui doivent être reconsidérées au filtre de l’impératif de la sécurité alimentaire et du droit à l’alimentation. A cet égard, le CCFD-Terre Solidaire soutient la construction du Partenariat mondial pour l’agriculture et la sécurité alimentaire qui, en réunissant l’ensemble des acteurs autour de la table – y compris la société civile – est une opportunité d’aller enfin vers une plus grande cohérence entre les politiques agricoles, commerciales, énergétiques et de coopération, dans un objectif de sécurité alimentaire. Mais l’efficacité d’une telle initiative dépendra du degré d’engagement des dirigeants pour mettre en œuvre ce Partenariat face à une urgence historique.
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Appel commun des organisations et réseaux européens
Paris le 29 juillet 2009. A l’occasion de la réunion sur l’agriculture du Conseil Européen (13 juillet 2009), les organisations signataires ont demandent aux ministres de l’agriculture des États membres ainsi qu’à la Commissaire européenne à l’agriculture Mme Mariann Fischer Boel de se prononcer pour la suppression immédiate et définitive de toutes les restitutions à l’export et de ne pas attendre pour cela la fin du cycle de négociations de l’OMC ! Concrètement, les organisations signataires demandent que les instruments de la Politique Agricole Commune après 2013 (PAC 2013) soient orientés de façon à être compatibles avec les enjeux des politiques de développement et qu’ils contribuent ainsi au combat contre la faim et la pauvreté. Le document complet en français (pdf) Document complet en anglais (pdf)Documents joints
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Politique agricole commune
Le CCFD-Terre solidaire n’a pas vocation première à se prononcer sur des dossiers européens ou nationaux. Mais l’interdépendance des économies conduit à ce que les choix économiques que nous faisons ici au Nord ont des conséquences directes sur les populations au Sud.
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Réorientation des aides de la PAC : un soutien insuffisant aux agricultures durables.
CP – 26 février 2009
Cette semaine, Michel Barnier a annoncé les choix de réorientation des aides agricoles françaises, dans le cadre du bilan de santé de la Politique agricole commune (PAC). Des choix qui vont dans la bonne direction, mais qui ne permettront pas à la France de répondre aux enjeux d’une agriculture durable.
Les organisations du groupe PAC 2013 saluent le rééquilibrage des aides annoncé, qui amorce un tournant en faveur de secteurs traditionnellement peu pris en compte par la PAC : soutien aux systèmes herbagers et aux ovins/caprins, et relance d’un plan protéagineux qui permettra de pallier en partie la dépendance de la France envers les importations de soja.Cependant, alors qu’il s’agissait d’une demande forte des organisations du groupe PAC 2013, le gouvernement n’a pas souhaité supprimer les références historiques dès 2010. Cela signifie qu’en 2013, à la veille de la prochaine réforme de la PAC, les agriculteurs français recevront toujours leurs aides en fonction du travail qu’ils auront réalisé 10 ans plus tôt !
Les organisations du groupe PAC 2013 regrettent également que seuls 129 millions d’euros sur 1,4 milliards d’aides -soit moins de 10%-, soient réorientés vers des pratiques et des systèmes de production plus durables : protéagineux, agriculture biologique et nouveaux défis (changement climatique, énergie renouvelable, biodiversité, eau…). Et en ce qui concerne l‘agriculture biologique, l’enveloppe prévue n’est pas à la hauteur de l’engagement du Grenelle de parvenir à 6% des surfaces en 2012. Il est donc regrettable que ces enjeux ne soient considérés que comme la dernière des priorités du gouvernement sur le bilan de santé, au moment même du lancement du plan Objectif Terre 2020 censé redessiner les contours du futur modèle agricole français.
Si le gouvernement veut donner une réelle chance à ce plan ambitieux, il est essentiel que les organisations de la société civile continuent à être partie prenante du débat sur la PAC. Elles souhaitent pour cela voir leur implication renforcée dans les processus de mise en place du bilan de santé et de refondation de la PAC après 2013.
Le groupe PAC 2013 est une plate forme de travail française qui associe des organisations d’agriculteurs, de solidarité internationale, de développement durable, et de protection de l’environnement sur l’avenir de la Politique agricole commune. Il regroupe notamment : Les Amis de la Terre, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), le Comité français pour la solidarité internationale (CFSI), la Confédération paysanne, la Fédération nationale de l’agriculture biologique des régions de France (FNAB), la Fédération nationale des centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (FNCIVAM), la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme, l’association 4D (Dossiers et débats pour le développement durable), le Réseau action climat, le Réseau agriculture durable, le WWF-France.
Contacts
Samuel Féret : + 33 6 08 83 12 35
Bernard Cressens, WWF : + 33 6 24 96 75 20
Ambroise Mazal, CCFD : + 33 6 79 44 33 81
Nouveau site internet : www.pouruneautrepac.eu -
Politique agricole commune : un bilan de santé décevant, une orientation confuse.
Vendredi 20 novembre, les ministres européens de l’agriculture sont parvenus à un compromis sur le bilan de santé de la Politique agricole commune -PAC. Le Comité catholique contre la faim et pour le développement qui participe activement au collectif d’associations Pac 2013 se déclare déçu de la position européenne. Elle désorganise les marchés agricoles qui ont besoin de régulation ; elle est trop timorée sur le transfert des aides pour affronter les défis environnementaux et ruraux de l’Europe. Aussi le CCFD-Terre solidaire demande-t-il que soit mise en place une nouvelle gouvernance pour décider de la mise en oeuvre du bilan de santé en France. il demande aussi que les collectivités territoriales et les organisations de la société civile soient parties prenantes à la définition de la politique agricole. Contacts : Ambroise Mazal, chargé de plaidoyer « souveraineté alimentaire » au CCFD-Terre solidaire : tél : + 33 (0)1 44 82 81 80, mail : a.mazal@ccfd.asso.fr Bernard Cressens, wwf tél : + 33 (0)6 12 06 16 55, mail : b.cressens@wwf.fr Samuel Féret, coordinateur du groupe Pac 2013 tél : + 33 (0)977 965 172, mail : samuel.feret@gmail.com Pour comprendre les tensions et les enjeux du bilan de santé de la PAC. Lisez le communiqué de Pac 2013.Documents joints
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Le Manifeste d’Annecy, pour des politiques agricoles justes, durables et solidaires.
Dimanche 21 septembre, le Comité catholique contre la faim et pour le développement a participé au rassemblement « changeons la PAC ». Une délégation européenne représentant les syndicats agricoles et les organisations citoyennes a rencontré Michel Barnier – Président en exercice du Conseil agricole européen. Elle lui a remis le « Manifeste pour des politiques agricoles justes, durables et solidaires » ainsi que les 31 000 signatures collectées dans le cadre de la campagne « l’agriculture est malade, soignons la PAC ». Les membres de la délégation ont ensuite défendu leurs revendications, accompagnés par les 5 000 manifestants rassemblés au bord du lac. Si la perception des enjeux semble aujourd’hui acquise, nous avons été atterrés par l’inadaptation des propositions du ministre français. Pour faire face aux variations dramatiques des prix dans un marché non maîtrisé, pour palier la disparition continue des paysans, face aux problèmes climatiques, le ministre, à l’heure où il importerait d’affirmer le Droit à la souveraineté alimentaire au Nord comme au Sud, n’envisage que de subventionner des systèmes d’assurances semi-privées et de prioriser le développement « des grandes exploitations durables ». Comme ses collègues européens, il refuse de mettre en cause l’abandon criminel des outils de régulation des marchés porté par la Commission européenne au nom de l’OMC ! Nous attendons des 27 ministres de l’Agriculture, qui ne se sont accordé que 3 heures de réunion mardi matin pour imaginer les contours de la PAC d’après 2013, qu’ils répondent par des politiques courageuses et innovantes aux réalités brutales vécues par les agriculteurs et les consommateurs, ainsi qu’aux urgences écologiques. Nous continuerons à porter ce débat dans l’opinion publique et renforcerons notre pression sur les responsables politiques pour réellement changer la Politique agricole et défendre une « Agriculture pour Vivre ! ». Contacts : Véronique de La Martinière, CCFD-Terre solidaire : 01 44 82 80 64 Anne Bringault, Amis de la Terre : 06 07 34 40 67 Geneviève Savigny, Confédération paysanne : 06 25 55 16 87 Le Comité d’organisation du Rassemblement d’Annecy : Action Consommation – Agir pour l’Environnement – Les Amis de la Confédération Paysanne – Les Amis de la Terre – Association Adéquations – Association Nationale des Bio consom’acteurs – ATTAC France – BIOCOOP – CCFD-Terre Solidaire – CEDETIM – CFSI -CGT – Confédération Paysanne – Coordination Sud – CRID – ECVC(Coordination Européenne-Via Campesina) – FADEAR – Fédération Artisans du Monde – FNAB – FNCIVAM – Fédération Peuples Solidaires – FSU – Greenpeace – INPACT (initiative pour une agriculture citoyenne et territoriale) – MDGRF – MINGA – MRJC – réseau PAC 2013 – RAC France –RES’OGM Info – S2B (réseau Seattle to Brussel) – Terre de Liens. Lisez le manifeste d’Annecy pour des politiques agricoles justes, durables et solidaires.Documents joints
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Réaction au bilan de santé de la politique agricole commune
Le CCFD, avec d’autres organisations, réagit aux propositions de la Commissaire européenne sur le bilan de santé de la PAC. Lire les propositions des organisations signatairesDocuments joints
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Pour le maintien d’une agriculture durable et solidaire
Dans le débat autour du bilan de santé de la Politique agricole commune, le CCFD, avec 14 autres ONG françaises, prône une autre politique pour le maintien d’une agriculture durable et solidaire. Lire la position du CCFD et de 14 ONG françaises En anglais, la position du CCFD et de 14 ONG françaisesDocuments joints
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Pour une politique agricole commune favorable au développement
Après plus de quarante ans d’existence, la politique agricole commune de l’Union européenne ou PAC présente un bilan mitigé. D’un côté, elle a assuré l’auto-suffisance alimentaire des pays européens et fournit de ce fait un exemple pour les pays du Sud. De l’autre, elle risque de représenter une menace pour les pays en développement. Coordination Sud porte le débat sur les objectifs des politiques agricoles, en Europe comme dans les pays en développement. Huit mesures sont préconisées. Télécharger le document de Coordination Sud (78 Ko) En anglais, la position de Coordination SUDDocuments joints
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Bilan de santé : il faut une autre politique agricole commune pour le maintien d’une agriculture durable et solidaire
Dans sa Communication sur le bilan de santé de la PAC du 20 novembre 2007, la Commission propose des ajustements techniques de la réforme décidée en 2003. Si certaines pistes avancées sont positives, elles ne doivent pas masquer la profonde crise de légitimité que traverse la PAC. Ainsi il est indispensable de jeter dès maintenant les bases d’une PAC plus durable et plus équitable, car elle évoluera désormais dans un contexte géopolitique et stratégique global dont les équilibres restent fragiles.
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