Au Niger, le prix du mil s’envole

Publié le 20.04.2022| Mis à jour le 01.07.2022

Ali Badara travaille en tant qu’ingénieur agronome dans une fédération de coopératives agricoles au Niger. Il est en première ligne aujourd’hui face à la crise alimentaire qui frappe son pays. Il explique comment le manque d’eau et l’insécurité au Sahel font flamber les prix du mil, ingrédient de base de la nourriture locale.

©Roland DARGELEZ/CCFD-Terre Solidaire
©Roland DARGELEZ/CCFD-Terre Solidaire

Ali Badara est un ingénieur agronome nigérien. Il travaille à la Fédération des coopératives agricoles du Niger, Mooriben, c’est-à-dire «  la misère est finie ». Fondée il y a 30 ans, Mooriben forme les paysans aux pratiques agro-écologiques et touche pas moins de 60 000 familles paysannes et éleveurs dans tout le pays. Nous avons recueilli son témoignage sur la situation actuelle au Niger :

Une récolte de mil catastrophique

Cette année, la situation alimentaire au Niger est très critique. La récolte de mil a été catastrophique. Or, cette céréale, appelée également sorgho, est la base unique de l’alimentation de nos campagnes : farine de mil, pâte de mil, boule de mil, mélangée à un peu de lait quand c’est possible. Dans les villes, comme  Niamey ou Zinder, la population consomme également du riz ou du maïs. Ce n’est pas le cas dans les campagnes.

Ces récoltes catastrophiques en octobre et novembre derniers s’expliquent avant tout par une sécheresse exceptionnelle de plus d’un mois, pendant la saison des pluies, normalement de juin à octobre. L’eau a manqué quand la plante en avait un besoin vital pour sa croissance.

2,5 millions de Nigériens sont en situation d’insécurité alimentaire

Ali Badara, ingénieur agronome à Mooriben

Les stocks s’épuisent

Aujourd’hui, nous abordons déjà la période de soudure, c’est-à-dire cette période où les gens ont fini leurs réserves et attendent la prochaine récolte. Or, les stocks communautaires sont déjà en train de s’épuiser. Ces stocks, souvent organisés par l’Etat, permettent aux plus vulnérables de s’approvisionner à prix modérés. C’est d’autant plus vital, que les prix du mil ont bondi de 30% par rapport à l’an dernier, du fait de la pénurie.

Le Niger, deuxième producteur de mil d’Afrique, en est réduit à importer du mil du Nigéria et du Burkina Faso. Mais les quantités achetées sont faibles et les prix élevés.

2ème

producteur de mil d’Afrique

30%

d’augmentation du prix du mil

Les djihadistes empêchent les paysans de cultiver

L’autre raison de cette crise alimentaire tient à l’insécurité croissante qui règne dans le pays. Dans des régions entières, les djihadistes brûlent les récoltes, imposent la terreur et chassent les habitants de leurs terres.

Les militaires impuissants face à l’insécurité dans les campagnes

C’est le cas notamment, vers Tillabéry, dans la région des trois frontières, qui jouxte le Mali et le Burkina Faso. Les déplacés se pressent dans la ville de Téra, la zone la plus militarisée du pays, où sont basées les forces nigériennes, tchadiennes et françaises. En fait, cette présence armée ne rassure pas les populations, car ces militaires semblent impuissants face aux terroristes.

Du niébé plutôt que du mil pour être plus en sécurité

Depuis un an, l’insécurité empêche de cultiver, surtout que les djihadistes ont pris l’habitude de se cacher dans les champs de mil dès que les plantes croissent. Alors, les rares agriculteurs qui restent se sont mis à cultiver le nié, un genre de haricots, moins hauts.

Pour nous, ce n’est pas facile de travailler dans ces conditions. Je suis responsable du suivi et de l’évaluation des projets depuis sept ans chez Mooriben. Je suis basé dans la capitale, Niamey, et il n’est pas possible de se déplacer à plus de cinq kilomètres en dehors de la ville, du fait de l’insécurité. Heureusement, nous avons un réseau efficace de paysans relais à l’intérieur du pays.

Des paysans relais pour faire fonctionner les banques céréalières

Ce sont les paysans relais qui continuent à apprendre aux paysans des pratiques durables, comme l’utilisation de fertilisants naturels, pour nourrir la terre.

Ce sont eux également qui assurent le bon fonctionnement des 347 banques céréalières de Mooriben. Elles existent depuis une quinzaine d’années pour permettre justement de s’alimenter pendant la période de soudure.

Recueilli par Pierre Cochez

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