A qui profitent vraiment ces investissements ?

Publié le 15.10.2013

Accès aux capitaux, emploi, croissance, transferts de technologies et de compétences et accès aux marchés internationaux… ce sont les vertus supposées des IDE (Investissements directs à l’étranger). Sur le terrain la réalité est souvent très différente.


Dans de nombreux cas, en l’absence de normes contraignantes permettant de les encadrer, les investissements riment avec affaiblissement des cadres juridiques vers le moins-disant social ou fiscal, destruction de l’environnement, accaparement et pillage de ressources du pays, destruction de modes de vie locaux, violations des droits des populations, avantages fiscaux exorbitants, voire évasion et fraude fiscale…

Le territoire et ses ressources : au cœur des appétits des investisseurs

Le territoire et ses ressources naturelles font aujourd’hui l’objet de toutes les attentions des investisseurs, et la financiarisation des matières premières ne concourt qu’à amplifier ce phénomène. Ainsi, l’explosion des IDE semble être allée de pair avec l’explosion des accaparements de terres et de ressources puisque, quel que soit le secteur (agroalimentaire, infrastructure, énergie), ces investissements se traduisent bien souvent par l’occupation d’un territoire. Cette prise de contrôle (par achat, location …), légale ou non, peut entraîner des impacts négatifs sur les communautés locales ou les usagers originels du terrain (privatisation des ressources collectives, menace sur l’accès à l’alimentation, déplacement de populations, détournement des ressources en eau…). Ces transactions peuvent alors affecter le modèle économique, sociétal, social et environnemental des communautés locales et porter atteinte à leurs droits. Les conflits d’intérêt qui accompagnent ces pratiques sont autant de signes qui démontrent un rapport de force inégal entre investisseurs, gouvernements et communautés locales, aggravé par la faiblesse des mécanismes d’accès et de recours à la justice par les communautés locales affectées.

L’argent du développement remplit parfois les réservoirs des 4×4 nord-américains
En 2009, la Société financière internationale (groupe Banque mondiale), la Corporation interaméricaine d’investissement, deux autres institutions de développement européennes (DEG et FMO), avec le soutien de PROPARCO – pour 14 millions de dollars – ont financé, Pantaleon, géant guatémaltèque et centraméricain du sucre et de l’éthanol. Ce projet devait soutenir le développement de l’outil industriel du holding, grand consommateur de terres dans un pays que l’on peut qualifier de « Golfe persique des agrocarburants ». Ainsi, tout en affirmant s’inscrire dans le cadre de son mandat en Amérique latine, qui consiste à soutenir une croissance verte et solidaire, PROPARCO participe en fait au développement du business des agrocarburants.

L’argent, nerf de la guerre… économique : une course vers le moins-disant social et fiscal

Un nivellement des droits par le bas
L’abondance d’une main-d’œuvre peu chère, des conditions de travail peu regardantes sur le respect des règles de l’Organisation Internationale du Travail sont également des éléments pris en compte par certains investisseurs étrangers, participant ainsi au dumping social. Malgré les revenus gigantesques que génère l’exploitation du pétrole, des minerais, du gaz ou des ressources forestières dans les pays en développement, près de 1,5 milliard de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour dans les pays pauvres, mais riches en ressources naturelles.

Fiscalité au rabais, délocalisation des bénéfices et évasion fiscale

La compétition mondiale pour attirer les investissements contribue à baisser fortement les taux d’imposition. Comme si cette course vers le bas ne suffisait pas, de nombreux pays offrent des cadeaux fiscaux supplémentaires (faible imposition, défiscalisation, zones franches…), alors que bien souvent ils auraient besoin des rentrées fiscales correspondantes, eu égard à la faible base imposable locale. Le nombre de zones économiques spéciales dans le monde ne cesse d’augmenter (79 en 1975 et 3 500 en 2006) elles offrent des avantages fiscaux, tout autant qu’une baisse des droits sociaux. Cette tendance est particulièrement notable en Afrique, où « la multiplication des régimes spéciaux instaure un véritable système parallèle avec une imposition presque nulle des entreprises ». Le Maroc a calculé que sa politique d’exemptions fiscales lui coûtait environ 18 % des recettes fiscales en 2011. Le Sénégal a évalué la perte à environ 5 % de son PIB en 2008.

De leur côté, les entreprises multinationales, premières utilisatrices des paradis fiscaux multiplient les stratégies pour réduire encore leurs impôts. C’est pourquoi les cinquante premiers groupes européens disposent chacun en moyenne de 117 filiales dans les paradis fiscaux. Les Caïmans accueillent ainsi deux fois plus d’implantations que l’Inde. Et la Chine en compte à peine plus que le Luxembourg (CCFD-Terre Solidaire et Revue Projet, 2013). Par la délocalisation artificielle des bénéfices depuis les pays de production ou de consommation vers les territoires faiblement taxés, elles siphonnent les ressources des pays en développement. Le manque à gagner en recettes publiques dans les pays en développement de la seule évasion fiscale des entreprises multinationales, se chiffre chaque année, à près de 125 milliards d’euros, soit plus que le montant de l’aide publique au développement mondiale.

Cette pratique généralisée de l’évasion fiscale est elle-même facilitée par les faiblesses du droit international en termes de droit fiscal des entreprises, à savoir l’absence de transparence comptable et des règles obsolètes faciles à contourner par les acteurs privés.

Le géant du commerce des matières premières, Glencore, aurait fait perdre à la Zambie, dont il exploite le cuivre, près de 132 millions d’euros de recettes fiscales pour une seule année (Eurodad, 2012). L’Associated British Food, propriétaire d’une sucrerie locale, aurait aussi privé Lusaka de 20 millions d’euros depuis 2007 (Action Aid, 2013). De son côté, SABMiller, un des leaders mondiaux de production de bière, aurait économisé autour de 21,5 millions d’euros d’impôts sur l’ensemble du continent africain, soit environ un cinquième des impôts dus. Une somme qui aurait permis de scolariser 250 000 enfants supplémentaires (Action Aid, 2010).

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