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Libre-échange : pas d’accords sans respect des normes sociales et environnementales!

février 4th, 2021 by

Ancien rapporteur spécial de l’Onu pour le droit à l’alimentation, Olivier De Schutter, est aujourd’hui rapporteur sur l’extrême pauvreté et aux droits humains. Selon ce juriste, professeur à l’université belge de Louvain, les accords de libre-échange sont, aujourd’hui, plus des freins au développement que des dispositifs au service des objectifs de développement durable (ODD)[[Les ODD : les 17 Objectifs de développement durables fixés par les Nations unies répondent aux défis mondiaux notamment de la pauvreté, des inégalités, du climat, de la dégradation de l’environnement, de la prospérité, de la paix et de la justice. Avec pour objectif d’atteindre chacun d’entre eux, et de leurs cibles, d’ici à 2030.]]. Explications.

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Tunisie : les femmes, premières victimes du manque d’accès à l’eau

février 3rd, 2021 by

Mauvaise gestion, réchauffement climatique et surexploitation sont en train de faire de l’eau l’un des enjeux les plus vitaux de la question sociale. Proclamé par la Constitution de 2014, le droit à l’eau est, dans la pratique, de plus en plus en difficile à garantir. Les femmes sont les premières touchées.

Les tendres paysages du nord du pays ont valu à la Tunisie d’être surnommée « la verte » (el Khadra). Pourtant l’eau est en train d’y devenir une ressource rare.

Les longues périodes de sécheresse se multiplient depuis quelques années et la pluviométrie pourrait baisser d’un tiers d’ici 2050

Les progrès accomplis, qui ont permis de garantir aujourd’hui un taux d’accès à l’eau potable de 100 % en ville et de 93 % en zone rurale (contre 30 % en 1985), sont compromis. La quantité d’eau disponible est passée aux alentours de 430 m3 par habitant et par an, sous le seuil des 500 m3 considéré selon les normes internationales comme la limite du stress hydrique.

Les longues périodes de sécheresse se multiplient depuis quelques années et la pluviométrie pourrait baisser d’un tiers d’ici 2050. La hausse de la température accélère l’évaporation des eaux captées dans les barrages dont l’envasement diminue sensiblement les capacités. La salinité des eaux souterraines augmente sous l’effet de la diminution du niveau des nappes phréatiques : la quasi-totalité dépasse le seuil de 1,5 g de sel par litre qui rend l’eau en théorie impropre à la consommation humaine et la réserve aux usages agricoles, non sans dégrader la qualité de la production alimentaire.

Cette crise va surcharger une infrastructure déjà fatiguée. Près de la moitié du réseau de la société nationale de distribution d’eau (la Sonede) a plus de 25 ans et le prix auquel l’eau est facturée ne couvre même pas les frais de fonctionnement. L’entretien et la modernisation ne suivent pas et les coupures se font de plus en plus fréquentes en ville. Notamment l’été.

Zones rurales

Le contrôle des ressources financières et de la distribution de l’eau est une source de corruption.

Dans les zones rurales la situation est encore plus alarmante. L’approvisionnement en eau de 1,5 million de Tunisiens, sur 11 millions, dépend d’associations d’usagers, les groupements de développement agricoles (GDA). Ils se financent par les cotisations de leurs membres et la vente de l’eau. Mais ils ne sont pas à la hauteur de la tâche. « Les assemblées générales n’ont pas lieu régulièrement, l’élection des conseil d’administration n’est pas transparente, déplore Minyara Mejbri, coordinatrice du projet justice environnementale pour la section du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES, partenaire du CCFD-Terre solidaire) à Kairouan. La direction des GDA est accaparée par des politiciens, des commerçants, des gens proches de l’administration. »

Le contrôle des ressources financières et de la distribution de l’eau est une source de corruption. L’argent de la maintenance est détourné, les réseaux sont mal entretenus et se dégradent, les fuites alourdissent les factures d’électricité pour le pompage. Le prix facturé pour l’eau à des usagers pourtant parmi les plus pauvres du pays, peut atteindre 1 à 1,5 dinar (1 euro = 3,4 dinars) par m3, soit 30 à 80 % plus cher que l’eau fournie par la Sonede.

Le fardeau des femmes

Mauvaise gestion et service défaillant, coût prohibitif, enclenchent un cercle vicieux : les abonnés ne paient pas leur consommation. Les taux de recouvrement ne dépassent pas 40 % du volume d’eau consommé, les GDA ne sont plus en mesure de régler leurs factures auprès de la Steg (la compagnie nationale d’électricité) qui coupe le courant et prive d’eau des territoires entiers, écoles et hôpitaux compris, pendant plusieurs jours, parfois plusieurs semaines. Conséquence logique, les familles vont se ravitailler à des sources ou des rivières parfois polluées, achètent à prix d’or des citernes d’eau sans contrôle sanitaire. Pour l’eau d’irrigation, les paysans multiplient les forages illégaux.

Cette faillite générale du système pèse lourdement sur les femmes auxquelles échoient les servitudes domestiques dont l’eau est la matière essentielle. Ce sont elles qui doivent passer des heures chaque jour pour aller se ravitailler aux bornes-fontaines ou aux oueds (cours d’eau dans les régions sèches). Beaucoup dans ces conditions sont incapables d’assurer l’hygiène de leur foyer et de leurs enfants, un problème crucial en cette période de pandémie.

L’eau est acheminée vers les gouvernorats voisins, tandis que nous, on meurt de soif !

Les taux de recouvrement ne dépassent pas 40 % du volume d’eau consommé, les GDA ne sont plus en mesure de régler leurs factures auprès de la Steg (la compagnie nationale d’électricité) qui coupe le courant et prive d’eau des territoires entiers, écoles et hôpitaux compris, pendant plusieurs jours, parfois plusieurs semaines. Conséquence logique, les familles vont se ravitailler à des sources ou des rivières parfois polluées, achètent à prix d’or des citernes d’eau sans contrôle sanitaire. Pour l’eau d’irrigation, les paysans multiplient les forages illégaux.

Cette faillite générale du système pèse lourdement sur les femmes auxquelles échoient les servitudes domestiques dont l’eau est la matière essentielle. Ce sont elles qui doivent passer des heures chaque jour pour aller se ravitailler aux bornes-fontaines ou aux oueds (cours d’eau dans les régions sèches). Beaucoup dans ces conditions sont incapables d’assurer l’hygiène de leur foyer et de leurs enfants, un problème crucial en cette période de pandémie.

Elles sont aussi les premières à se mobiliser pour exiger leur droit à l’eau potable. En janvier 2020, les habitantes d’Erroui, un hameau du nord-ouest du pays, le « château d’eau de la Tunisie », avait organisé une marche vers un barrage situé à quelques kilomètres de chez elles : dont « l’eau est acheminée vers les gouvernorats voisins, tandis que nous, on meurt de soif ! », avaient-elles protesté.

Au-delà de la crise des GDA, c’est tout le système de gestion des ressources hydriques qui est en crise. Le gouvernorat de Kairouan, au centre du pays, est l’un des plus défavorisés, un tiers seulement de sa population est desservie par la Sonede. Qui plus est « le réseau de la Sonede est très mauvais et beaucoup de GDA sont paralysés par des conflits », explique Ines Labiadh, directrice du département Justice environnementale du FTDES. « la région, poursuit-elle, compte sept unités de conditionnement d’eau minérale en été, l’eau potable est coupée pour les habitants des zones rurales tandis que de l’eau en bouteille est fournie aux marchés urbains ».

Thierry Brésillon

Palestine : les femmes journalistes à l’assaut d’une société conservatrice

janvier 20th, 2021 by

Depuis sa création, en 2005, Filastinyat, association partenaire du CCFD-Terre Solidaire, a fait de l’appui aux femmes journalistes palestiniennes son principal combat. Un moyen de promouvoir une autre vision dans les médias, principalement aux mains des hommes, mais aussi de faire bouger les lignes d’une société conservatrice.

Journaliste depuis six ans à Gaza, Marah Elwadiya, n’est pas du genre à se laisser décontenancée. Sa vie de free-lance n’est pourtant pas un long fleuve tranquille : « Sur la dizaine de propositions d’articles et de vidéos que je fais aux médias avec lesquels je collabore, seul une à deux sont retenues chaque mois », soupire-t-elle. La concurrence sévère, l’est encore plus avec la crise de Covid-19 qui se double d’une crise économique. « Mais cela n’explique pas tout. C’est très difficile pour une femme de se battre dans cet environnement encore essentiellement masculin, ajoute-t-elle. Nous ne bénéficions pas, comme les hommes, de l’appui d’organisations professionnelles puissantes qui nous représenteraient. »

Pour Marah, comme pour nombre de femmes journalistes, les défis sont de taille : Ils sont d’abord financiers, car vendre deux productions par mois, ne suffit pas pour faire vivre une famille. Mais derrière cette volonté de se battre, il y a aussi une envie d’émancipation et un besoin de bousculer une société palestinienne encore très patriarcale.

Nous ne bénéficions pas, comme les hommes, de l’appui d’organisations professionnelles puissantes qui nous représenteraient

« Dans les territoires palestiniens, la voix des femmes mais aussi des jeunes est très peu entendues. Quand il est question d’une femme, dans les médias, elle est toujours vue et traitée comme la mère, la fille, la sœur de héros masculins », confirme Wafa Abdel Rahman, qui en 2005, a créé l’association Filastinyat pour lutter contre cette représentation. « Au départ, nous avions fait tout un travail de sensibilisation auprès de la population à travers des ateliers de décryptage des médias. Mais rapidement, nous nous sommes rendu compte que cette approche n’était pas suffisante et qu’il fallait donner aux femmes elles-mêmes les moyens d’influencer l’opinion pour changer cette image. Nous sommes passées d’une position de chargées de plaidoyer à un rôle d’accompagnement des volontaires dans l’affirmation de leur capacité à prendre leur destin en main. »

Du plaidoyer à l’action

Cette mutation s’est faite par étape. Dès 2009, l’idée d’organiser des formations, des ateliers et des conférences à l’attention des femmes journalistes fait son chemin. Un an plus tard, des « clubs » rassemblant les femmes journalistes leur permettent d’échanger sur la manière dont les unes et les autres ont réussi à modifier la place des femmes dans les médias. Depuis une décennie, 400 journalistes femmes, des jeunes diplômées, mais aussi des professionnelles confirmées, ont répondu à l’appel à Gaza et 150 en Cisjordanie. Près de la moitié sont toujours très actives, car elles y trouvent une force collective et des conseils avisés sur des questions techniques, comme par exemple pour réaliser un reportage audio. « C’est aussi un moyen de se faire un réseau, de s’entraider, de pouvoir échanger des idées mais aussi des contacts avec d’autres femmes journalistes », apprécie Marah.

« Ces échanges sont d’autant plus stimulants qu’il y a un regard journalistique féminin particulier, pointe Wafa. Une attention aux aspects humains, à l’impact des décisions ou des événements sur le quotidien des gens ». C’est vrai pour les articles sociaux mais aussi pour les articles politiques. Aux grands discours et théories, les femmes préfèrent des approches plus concrètes. Derrière le nombre de morts des conflits, les journalistes féminines vont, par exemple, s’intéresser à la manière dont la guerre s’insinue dans la vie quotidienne. L’occupation palestinienne est traitée à travers son impact sur les habitants de la bande de Gaza qui se retrouvent séparés de leur famille. Sur la crise économique, même prisme : les hommes parlent de ses conséquences chiffrées et désincarnées quand les femmes vont mettre l’accent sur le ressenti d’une mère de famille qui doit se soucier du bien-être des membres de son foyer.

Petit à petit, les patrons de presse commencent à considérer leur travail autrement car leurs articles font grimper l’audience de leur média

Grâce à cet accompagnement et cette bienveillance, les femmes journalistes prennent confiance en elles et impriment leur marque. Petit à petit, les patrons de presse commencent à considérer leur travail autrement car leurs articles font grimper l’audience de leur média, le public étant avide de cette façon de traiter l’information. « C’est notre chance car si personne ne regardait ou ne lisait leurs productions, notre influence serait bien maigre ! », reconnaît Wafa.

Le combat continue

Mais avec la crise sanitaire, la situation économique se tend et les jeunes femmes diplômées ont bien du mal à trouver un emploi. C’est pourquoi, en plus des activités traditionnelles, l’association a renforcé ses programmes destinés aux jeunes journalistes femmes, obligées de devenir free-lance quand rien ne les y a vraiment préparé. L’association s’est ainsi équipée de matériels dernier cri. A Gaza et bientôt à Ramallah, les participantes aux différentes activités, ont la possibilité de s’initier à la création de contenus pour les médias en ligne. « Nous avons aussi créé une agence de presse interne, NAWA, qui achète certaines de leurs productions. Nous les diffusons sur notre propre réseau, ce qui accroit la visibilité de leurs auteures. Nous les aidons aussi à vendre leurs productions à des médias extérieurs. »

Les contacts noués dans le cadre des « clubs » s’avèrent, eux aussi, de véritables sésames. En raison du confinement, les rencontres en présentiel ont dû être supprimées, et ont été remplacées par des sessions de formation en visio-conférence qui ont démultiplié les opportunités de mises en relation. Les manifestations organisées par Filastinyat, ne sont plus seulement réservées aux femmes des territoires palestiniens, et sont de plus en plus regardées par un public international, dans les pays arabes mais aussi en Europe. Une dimension très enrichissante, reconnaît Wafa : « Nous devons poursuivre cette internationalisation après cette crise qui met aujourd’hui à mal nos finances. En espérant que nous pourrons reprendre nos activités quand tout sera fini. Car rien n’est acquis et les clubs de femmes restent sans doute un des meilleurs moyens d’aider leurs membres à faire bouger les lignes par rapport aux médias mais aussi par rapport à l’ensemble de la société. »

Laurence Estival

RCA : femmes médiatrices de paix

janvier 13th, 2021 by

Quand une société est en mille morceaux, il faut recoller. Et pour cela, mieux que des grands discours, il faut commencer petit, et tout près de chez soi. Voici, très résumée, la philosophie des médiatrices de paix centrafricaines. Sur le papier, c’est très simple. Dans la réalité de ce pays brisé, c’est un peu plus compliqué.

En cette fin d’année 2020, Marie-Mathurine Dongoula, Awa Abdaraman, et leurs compagnes du village de Koulamandja, à 22 kilomètres au nord de Bangui, ont fort à faire. La peur est revenue, et avec elle, les tensions entre voisins, dans les couples, dans les familles. Deux jours avant notre visite, une rumeur a couru : « Ils arrivent ! » a lancé un habitant, puis un autre, en parlant des groupes armés. L’effroi les a saisies, puis Marie-Mathurine et Awa ont décidé de ne pas fuir, et elles ont convaincu les autres. Avec ce qu’elles ont appris à faire : dialoguer, apaiser, expliquer. Chacun est resté chez soi, pour ne pas livrer les modestes maisons aux pilleurs. Qui ne se sont finalement jamais montrés.

Chrétiennes, et musulmanes, elles opèrent main dans la main

Elles sont une cinquantaine dans le village à appartenir au réseau de médiatrices de paix formées depuis 2015, en pleine guerre civile, par la Pijca (Plateforme interconfessionnelle de la Jeunesse centrafricaine). Un programme conçu et financé par le CCFD-Terre Solidaire, destiné à régler les conflits locaux et contribuer à la réconciliation. Chrétiennes, comme Marie-Mathurine, et musulmanes, comme Awa, elles opèrent main dans la main. Ce qui, ici, a son importance.

Dans les soubresauts depuis des décennies

La Centrafrique vit dans les soubresauts depuis des décennies. La dernière a été particulièrement sanglante. En 2013, une coalition de groupes armés venus du nord et de l’est du pays, la Seleka, prend le pouvoir à Bangui. Ils prétendent agir au nom des musulmans, discriminés depuis longtemps. En fait, ils pillent, tuent et violent, sans égard pour la confession ou le genre. Le président renversé, François Bozizé, appuie la création de groupes d’auto-défense, chrétiens ceux-là, les anti-balaka. Qui usent des mêmes méthodes que leurs ennemis. La religion instrumentalisée, la guerre devient civile et confessionnelle.

La « crise », comme disent les Centrafricains dans un euphémisme dont ils ont le secret, n’est pas terminée, malgré un accord de paix signé en février 2019. Le 16 décembre dernier, les ennemis d’hier, Seleka et anti-balaka, se sont unis pour lancer une nouvelle offensive contre les autorités centrales. De différences religieuses, il n’est plus question. Aujourd’hui, il s’agit de banditisme, beaucoup, et de politique, un peu.

Elles sont plus de 300 médiatrices dans tout le pays aujourd’hui.

Malgré la panique que suscitent ces hommes armés sur leurs motos ou leurs pick-up, le réseau des médiatrices sociales pour la paix fait partie de ces structures qui tiennent le coup. Et qui permettent à la société de ne pas s’effondrer. Exclusivement féminin, il se développe en rhizome : les médiatrices en forment d’autres, elles-mêmes vouées à partager leur expérience. Elles sont plus de 300 dans tout le pays aujourd’hui.

« Tache d’huile »

À l’origine, une toute jeune femme, Adja Kadije, 26 ans aujourd’hui, ingénieure civile, militante de la paix depuis 2013 et une des premières filles à œuvrer au sein de Pijca à partir de 2014. Elle-même a bénéficié d’une formation de l’association française Génération Médiateurs. « Les femmes ont beaucoup de contacts dans la société. Elles sont éducatrices, elles vont chercher l’eau, le bois de chauffe, elles font les courses. Une fois formées aux questions de paix et de sécurité, elles en discutent à la maison, avec leurs amies, dans leur quartier, et ça fait tache d’huile. »

Véronique Apenge, 27 ans, étudiante et secrétaire générale adjointe de Pijca filles, se souvient de la première formation, à Boda, ville à 200 km et une demi-journée de piste de Bangui. Les communautés confessionnelles s’y étaient violemment affrontées, au point de couper la localité en deux. « Les chrétiennes et les musulmanes refusaient de se parler, raconte-t-elle. Elles juraient qu’elles ne pouvaient pas pardonner. Il y a eu beaucoup de pleurs. » Et puis la conciliation a fait son chemin et les médiatrices de Boda ont, elles-mêmes, formé d’autres femmes, dans les villages alentours.

« Ils ont fini par déposer les armes »

Marie-Mathurine et Awa, elles, ont eu fort à faire avec les anti-balaka de leur village. « Nous intervenions pour qu’ils cessent leurs forfaits, se souvient Marie-Mathurine. Ils se reconstituaient sans cesse, perturbaient les réunions des femmes. » À force de discussions et de pressions, ils ont fini par déposer les armes. Les médiatrices ont ensuite œuvré pour qu’ils réintègrent la communauté. « Beaucoup de gens voulaient les chasser. Nous avons sensibilisé, négocié, rappelé qu’ils étaient d’ici, qu’ils étaient nos enfants », raconte Awa. Même Esther Ndewe a accepté. Cette mère de famille de 32 ans avait pourtant reçu, en 2013, deux balles dans la jambe qui l’ont laissée handicapée, parce qu’elle avait eu un enfant avec un musulman. Elle appartient aujourd’hui au réseau des médiatrices de paix. « Ce que je veux voir dans mon pays demain, il faut que je le fasse dans mon quartier aujourd’hui », conclut Adja.

Gwenaëlle Lenoir

Liban : des jeunes palestiniens au risque de l’enrôlement

janvier 8th, 2021 by

Dans le camp surpeuplé de réfugiés d’Ain El Héloué au Liban, les jeunes Palestiniens sans aucune perspective d’avenir ne rêvent que d’immigration. Ils sont une proie facile pour les factions armées palestiniennes qui les enrôlent. Pour tenter de contrer ce phénomène, notre partenaire Naba’a a lancé un programme de prévention basé sur la formation.

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Femmes migrantes en Argentine : « Leur situation a empiré depuis la pandémie »

juillet 31st, 2020 by

Alors que l’Argentine a été plutôt épargnée jusqu’ici par le Covid-19, Valeria Chiavetta, Responsable de la Fondation oecuménique de Cuyo (FEC), partenaire du CCFD-Terre Solidaire, estime que la situation économique, sociale et administrative des migrants s’est aggravée. En particulier celles des femmes.

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Tchad : sortir des clivages

juillet 17th, 2020 by

Au Tchad, 30 ans de fracture entre un Nord musulman et un Sud chrétien ont profondément marqué les relations entre les communautés. Des associations de jeunes tentent de dépasser ces clivages pour construire une société plurielle.

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Philippines : comment le gouvernement utilise-t-il la pandémie pour renforcer la répression ?

juillet 7th, 2020 by

Déjà défavorisés, les populations indigènes de Mindanao ou les habitants des zones rurales, l’ont été davantage pendant la pandémie. Une période aussi marquée par une recrudescence de la présence militaire dans ces zones. Témoignage de Judy Pasimio, coordinatrice du réseau Lilak, partenaire du CCFD-Terre Solidaire.

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Sénégal : les usines de farines de poisson menacent la sécurité alimentaire

juin 26th, 2020 by

Au Sénégal, comme dans nombre de pays d’Afrique de l’Ouest, le poisson représente plus de 70 % des apports en protéines. Mais la pêche artisanale, pilier de la sécurité alimentaire, fait face à de nombreuses menaces, dont l’installation d’usines de farine et d’huile de poisson. De Saint-Louis à Kafountine, en passant par Dakar et Kayar… les acteurs du secteur organisent la riposte, avec notre partenaire l’Adepa.

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En Colombie, les femmes se transmettent le virus de la solidarité

juin 9th, 2020 by

Si le Covid-19 a jusqu’ici fait peu de victimes en Colombie, la population subit déjà ses effets socio-économiques. En particulier les femmes qui affichent pourtant, à la ville comme à la campagne, résistance et solidarité.


C’est comme une pandémie dans la pandémie. Depuis le début de la crise sanitaire en Colombie, des tâches rouges ont fait leur apparition puis se sont largement répandues dans les quartiers populaires des principales villes du pays. « Comme beaucoup de familles du quartier, j’ai accroché un chiffon rouge à ma fenêtre pour exprimer ma détresse et interpeller le gouvernement sur le fait que je n’ai même pas de quoi me nourrir, explique Maria Virgelina Bustamante, 63 ans, qui habite un quartier pauvre de la banlieue de Medellin, la capitale du département d’Antioquia, au nord-ouest du pays. Avant l’apparition du coronavirus, je gagnais déjà difficilement ma vie en fabricant du pain que je vendais dans la rue, à des restaurants de quartiers ou des associations. Mais là, je suis très inquiète. Je ne sais pas ce que je crains le plus : la faim ou le virus ».

La Colombie vit depuis le 25 mars un confinement général strict et obligatoire. Une heure maximum de sortie par jour, un jour sur deux. Les mesures contraignantes, dont le respect est assuré par quelques 60 000 policiers et militaires, ont donné jusqu’ici des résultats sanitaires plutôt probants : 43 682 personnes contaminées et « seulement » 1 433 morts au 10 juin 2020, pour une population de 48 millions d’habitants.

Mais ces mesures ont également des effets négatifs sur le plan économique, notamment pour les populations les plus modestes. « Dans un pays où 6 personnes sur 10 travaillent dans le secteur informel, l’impossibilité de sortir chaque jour pour aller travailler a des conséquences dramatiques, explique Patricia Luli, directrice de Vamos Mujer, une association féministe, partenaire du CCFD-Terre Solidaire. C’est encore plus vrai pour les femmes vivant en zone urbaine, qui constituent une large part de ces emplois informels ».

Plus facile à la campagne

Ce constat s’appuie notamment sur une enquête téléphonique menée par Vamos Mujer en avril. « Nous avons interrogé 350 femmes vivant à Medellin et dans 15 autres municipalités d’Antioquia, y compris dans les zones rurales », détaille Patricia Luli. L’initiative permet de maintenir le lien avec des femmes leaders communautaires et de renforcer des réseaux de solidarité. Elle a abouti à plusieurs constats récurrents. « Outre la situation économique précaire liée au travail informel, les femmes se sont dit affectées psychologiquement par l’absence de vie sociale, a noté la responsable. Beaucoup évoquent aussi une surcharge de travail domestique ».

La possibilité de se nourrir d’aliments produits à proximité de la maison permet d’affronter la crise dignement

Pour les femmes rurales, le constat est un peu moins inquiétant. « La possibilité de se nourrir d’aliments produits à proximité de la maison leur permet d’affronter la crise dignement. Ces femmes, dont la plupart sont membres de réseaux agro-écologiques, appellent d’ailleurs à semer davantage et à renforcer les pratiques de troc de semences et des liens de solidarité ».

Clara Ines Tavares Acevedo, fait partie de ces femmes-là. Cette agricultrice de 53 ans cultive avec son époux un lopin de terre dans le village de Bolivar, à 200 kilomètres au nord de Medellin. « Avec la fermeture pendant la pandémie du marché d’Anorí, la ville la plus proche, nous ne pouvons plus vendre nos produits, explique cette femme de 53 ans qui possède également une quinzaine de ruches. Mais au moins, nous avons de quoi nous nourrir et faisons de la vente et du troc entre voisins ».

La situation est plus inquiétante pour l’éducation des enfants. « Comme les établissements scolaires sont fermés, les cours sont censés être donnés à distance, via internet. Sauf qu’ici il n’y pas de connexion, donc ils prennent du retard ».

Pour Ligia Castañeda Palacio, qui possède une ferme à la sortie d’Anorí, c’est différent. « Nous n’avons pas de voisins pour vendre nos produits ou faire du troc. Économiquement c’est dur, d’autant que mon mari, journalier dans des grandes fermes ou sur des exploitations minières, n’a plus d’activité ». De quoi tendre aussi les relations à la maison.

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Fatiguées mais solidaires

« Depuis le début du confinement, nous enregistrons trois fois plus de témoignages de violences domestiques dans la région, assure Julie Mercela Galiano Garcia, la présidente de l’Association municipale des femmes d’Anorí (Ammuan), qui travaille avec Vamos Mujer. Alors même qu’Antioquia est déjà le département le plus impacté du pays – après la capitale, Bogota – en termes de violences domestiques, avec 1 927 cas sur les 15 440 recensés dans le pays en 2019 ».

Les femmes indigènes aussi subissent ce type de violences. Mais pas seulement. « La paralysie générale due à la pandémie rend encore plus agressifs les groupes paramilitaires, souligne Ana Teresa Vergara Casama issue du peuple Embera Dobida, au nord du département. Mais le pire, c’est lorsque nous sortons de nos communautés pour la récolte des avocats, précise la conseillère de l’Organisation Indigène d’Antioquia (OIA), partenaire du CCFD-Terre Solidaire. Non seulement nous sommes détroussées, mais beaucoup de femmes sont victimes de viols ».

« Avec le confinement, de nombreuses femmes se retrouvent aujourd’hui dans des situations d’urgence car tout manque, appuie Patricia Lulli. Et ce ne sont pas les quelques mesures d’aides financières et les actions humanitaires pour la fourniture de denrées, initiées aux niveaux national et local, qui changent la donne ».

D’où l’importance de conserver le lien, même virtuel. « Que ce soit à travers les réseaux sociaux ou l’organisation de visioconférences, sentir le soutien d’autres femmes donne de la force », se réjouit la directrice de Vamos Mujer, pour qui ces outils de communication resteront utiles après la pandémie. « C’est un vecteur de solidarité et c’est cette solidarité qui permettra aux femmes, après cette crise sanitaire, de continuer à construire une société où elles ont toute leur place ».

Jean Claude Gerez

Et aussi, dans notre dossier spécial Covid-19 : nos témoins d’une terre solidaire :

Togo : la société civile face à l’instrumentalisation de la crise sanitaire

juin 3rd, 2020 by

Au Togo, les défaillances du système sanitaire sont criantes. Les ONG partenaires du CCFD-Terre Solidaire réagissent concrètement face au Covid-19… quitte à prendre les rênes, exaspérées par une récupération politique évidente des autorités.

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Covid-19 : le secteur de la pêche durement touché en Indonésie

mai 26th, 2020 by

Le gouvernement indonésien a tardé à prendre des mesures de prévention face à la propagation du coronavirus. L’économie est fortement ralentie et les pêcheurs artisanaux payent un lourd tribu.

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Liban, Syrie : survivre au Covid-19 dans les camps de réfugiés

mai 15th, 2020 by

Comment le coronavirus bouleverse-t-il davantage le quotidien des réfugiés syriens au Liban ? À leurs côtés, notre partenaire le Service jésuite des réfugiés (JRS), raconte.

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Coronavirus à Gaza : « C’est plus difficile quand le danger est invisible »

avril 6th, 2020 by

Comme toute la Bande de Gaza, l’association Culture et Pensée Libre guette les premiers signes de propagation de la pandémie de Covid-19. Elle a bouleversé les programmes qu’elle offre à un public d’enfants, d’adolescents de femmes, dans le domaine de la culture, de l’éducation et de la santé.

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