S’attaquer au vide juridique international qui empêche les victimes des multinationales d’accéder à la justice

Publié le 02.10.2019| Mis à jour le 08.12.2021

À ce jour, il n’existe pas de cadre juridique international contraignant pour garantir la responsabilité des entreprises multinationales en matière de droits humains et de protection de l’environnement. Le recours à la sous-traitance et l’éclatement des entreprises en de multiples filiales compliquent l’accès à la justice pour les victimes. Les entreprises donneuses d’ordre profitent de ce flou juridique pour se décharger de leurs responsabilités.

L’impossibilité pour les victimes des multinationales d’obtenir justice

En cas d’atteintes aux droits humains ou à l’environnement commises par une multinationale, les recours sont limités et les entraves sont nombreuses pour accéder à la justice.
Les procédures sont extrêmement longues et débouchent rarement sur des solutions satisfaisantes pour les victimes.
Il faut parfois attendre des années avant que des indemnisations soient versées ou que des travaux de dépollution soient entrepris.
Bien souvent, les victimes se heurtent à des situations insupportables de déni de justice.
Les tribunaux des pays d’origine des entreprises refusent de statuer sur l’affaire aux motifs que les faits ont eu lieu à l’étranger, que les faits sont prescrits ou de la difficulté à enquêter.
Ce refus de rendre justice révèle le système d’impunité qui protège les entreprises multinationales au détriment des droits humains et de la protection de l’environnement.


Un exemple au Nigeria

En 2008, la fuite de deux pipelines provoque un véritable désastre écologique dans le delta du Niger.

Selon un rapport de l’ONU de 2011, 25 à 30 ans seraient nécessaires pour le nettoyage et la dépollution de la région. L’agriculture et la pêche ne sont plus possibles et les populations sont exposées à de graves risques sanitaires. 40 000 personnes, membres des communautés victimes de la pollution ont porté plainte contre Shell. Elles ont été déboutées sous prétexte que la multinationale n’était pas responsable pour les agissements de sa filiale nigériane, qu’elle détient pourtant à 100% .

En 2017, après 10 ans de négociations, Shell a enfin lancé un plan de nettoyage, mais aucune condamnation pour négligence, et aucune condamnation obligeant la multinationale à verser des dommages et intérêts aux personnes affectées n’a à ce jour été obtenue.

La loi française sur le devoir de vigilance, un réel espoir si elle est appliquée

La loi française sur le devoir de vigilance fait figure d’exception et de modèle pour la régulation des entreprises multinationales. Cette loi représente une avancée majeure pour les droits humains et l’environnement : elle rend les entreprises juridiquement responsables des atteintes que leurs activités (ou celles de leurs partenaires) peuvent occasionner, tout en offrant un recours aux populations impactées.

Pourtant, deux ans après son adoption, le CCFD-Terre Solidaire a fait le constat dans un rapport commun que celle-ci n’était peu ou pas appliquée : les premiers plans de vigilance sont, pour la plupart, inexistants ou incomplets. En l’absence d’un dispositif de suivi de la loi par l’État, le CCFD-Terre Solidaire et Sherpa ont également publié un site, plan-vigilance.org, afin de recenser les entreprises soumises au devoir de vigilance et permettre à chacun d’accéder facilement aux plans de vigilance publiés par les entreprises concernées. Nous portons en ce moment un plaidoyer spécifique auprès des pouvoirs publics et des parlementaires afin de veiller au suivi et à la bonne application de la loi sur le devoir de vigilance.

En Europe, plusieurs pays discutent en ce moment de l’adoption de lois similaires à la loi française sur le devoir de vigilance (Pays-Bas, Suisse, Finlande, Allemagne). Dans ce contexte, la Commission européenne a mandaté une enquête auprès des associations, des syndicats et des organisations professionnelles afin de voir quelle forme pourrait prendre cette directive européenne. L’adoption d’une directive dans les trois ans qui viennent est donc très fortement probable.

Défendre un traité Onu contre l’impunité des multinationales

Du 14 au 18 octobre 2019 aura lieu à Genève la 5e session de négociations du groupe de travail intergouvernemental de l’ONU pour l’élaboration d’un traité international contraignant sur les multinationales et les droits humains.

Pourtant, l’Union européenne n’y participera pas sous prétexte que la Commission européenne n’est pas encore opérationnelle et n’a pas le mandat nécessaire pour porter démocratiquement la voix des pays membres — mandat que nous réclamons depuis cinq ans… Au même moment, l’Union européenne négociera à Vienne la création d’un tribunal d’arbitrage international permanent, entérinant ainsi le système de l’arbitrage international qui garantit une justice à la carte pour les multinationales.

Pour en savoir plus

Consulter notre dossier Vers un traité Onu contre l’impunité des multinationales

Retrouver notre site de campagne pour sensibiliser le grand public aux enjeux liés à l’impunité des multinationales et signer la pétition : ReprenonsLePouvoir.org

Pour aller plus loin :
– Note d’analyse à destination des parlementaires européens et en anglais
– Note d’analyse à destination des parlementaires et du Gouvernement français.
– Un dossier de presse est également disponible

En savoir plus sur notre combat contre l’impunité et pour la régulation des multinationales

Si vous avez déjà signé la pétition et que vous voulez aller plus loin, vous pouvez nous soutenir financièrement

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